À une fleur séchée dans un album

Il m’en souvient, c’était aux plages
Où m’attire un ciel du midi,
Ciel sans souillure et sans orages,
Où j’aspirais sous les feuillages
Les parfums d’un air attiédi.

Une mer qu’aucun bord n’arrête
S’étendait bleue à l’horizon ;
L’oranger, cet arbre de fête,
Neigeait par moments sur ma tête ;
Des odeurs montaient du gazon.

Tu croissais près d’une colonne
D’un temple écrasé par le temps ;
Tu lui faisais une couronne,
Tu parais son tronc monotone
Avec tes chapiteaux flottants ;

Fleur qui décore la ruine
Sans un regard pour t’admirer !
Je cueillis ta blanche étamine,
Et j’emportai sur ma poitrine
Tes parfums pour les respirer.

Aujourd’hui, ciel, temple et rivage,
Tout a disparu sans retour :
Ton parfum est dans le nuage,
Et je trouve, en tournant la page,
La trace morte d’un beau jour !


Alphonse de Lamartine,
Œuvres complètes de Lamartine (1860), Tome 1

2 réflexions sur “À une fleur séchée dans un album

  1. marie 16/11/2021 / 14:29

    Bonjour Michel
    Je me souviens, moi aussi, d’une rose jaune retrouvée dans un livre….
    J’ai toujours adoré les roses jaune.
    Bon après-midi
    Amicalement
    MTH

  2. Danielle ROLLAT 16/11/2021 / 21:26

     » et rose, elle a vécu, ce que vivent les roses, l’espace d’un matin… »

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