J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle, dit le docteur. La bonne ? Vous n’avez pas la Covid. La mauvaise ? Vous avez un cancer. »
Si l’épidémie, en France, a fait plus de 113 000 morts, elle a aussi permis de sauver des vies : des « miraculés » qui, se croyant atteints du virus, ont multiplié les examens et pu faire soigner à temps une pathologie qui n’aurait pas été détectée sans cela. « Quand il n’y avait pas encore de tests PCR, on faisait des scanners à ceux qui avaient des difficultés respiratoires », explique le Dr Jean-Philippe Masson, le président de la Fédération nationale des médecins radiologues. Cancers du poumon, calcification des artères coronaires, calculs… Au détour d’une radio ou d’un examen sanguin, les médecins découvraient des anomalies qui n’auraient pas été décelées aussi rapidement sans la crainte du Covid. « Ça nous a permis de prendre les patients en charge en amont et d’éviter des formes plus graves car plus avancées », précise le radiologue.
A l’automne dernier, Marc souffre de picotements dans la cage thoracique. « Je me croyais envahi par le Covid », raconte l’homme de 53 ans, alors que le deuxième confinement vient d’être décrété. La douleur devenant insupportable, il se rend aux urgences, où son test Covid revient négatif.
Test sauveur
Les soignants lui font alors une prise de sang, qui révèle un taux anormal d’une hormone indiquant un stress cardiaque. Une coronarographie distingue une fracture coronarienne — prise à temps. Même soulagement pour Ludwig, 59 ans, qui a profité du confinement pour reprendre la course. Vite essoufflé, il suspecte un cas de Covid. A tort. L’angiographie à laquelle il se soumet indique que ses artères sont bouchées ; il subit un quintuple pontage. « Sans cette suspicion de Covid, je n’aurais probablement pas été diagnostiqué aussi vite », conjecture Ludwig.
Autant de « miraculés » dont le nombre ne compense pas, cependant, celui des victimes, directes ou différées, des déprogrammations d’opération et autres retards de diagnostic imputables à l’épidémie. En février, la Ligue contre le cancer affirmait ainsi que 93 000 diagnostics de la maladie n’avaient pu être réalisés en 2020. Le Covid, on ne lui dit pas merci…
Article signé des initiales F. R.-G.-A. / Le Canard Enchainé – 25/08/2021