Le bouffon du roi

Le plus surprenant, avec certains intellectuels médiatiques, c’est qu’à chacune de leurs dérives, alors qu’on croit qu’ils ont touché le fond, ils réussissent à tomber plus bas encore.

Attention cet article est daté du 08 janvier 2007 et s’il garde toute sa pugnacité envers l’idéologue de salon, Alain Finkielkraut, il reste d’actualité sociétale … hélas, rien depuis 13 ans n’a été fait pour les banlieues et la pandémie n’aura fait qu’aggraver la situation … quelle catastrophe pour demain en adviendra ???

Alain Finkielkraut en est le prototype. Après avoir encensé la journaliste islamophobe Oriana Fallaci, couru au secours des victimes d’une « ratonnade anti-Blancs », diffamé dans Haaretz la révolte des banlieues qualifiée de « pogrom contre la République (1)  », le voilà qui, le 08 janvier 2007 dans son émission « Répliques » sur France Culture, agresse les jeunes des cités.

A Joël Roman argumentant patiemment, dans l’esprit de son essai Eux et nous (2), pour que la France traite enfin également tous ses enfants, Finkielkraut oppose un discours nostalgique et réactionnaire, avec le concours attendu de Thierry Jonquet, lui aussi invité pour son roman Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte (3).

Plutôt que de réfléchir sur la situation des jeunes issus de l’immigration, l’animateur préfère entonner son refrain favori en dénonçant leur « haine sans précédent à l’égard de la culture française (…), une haine à laquelle les professeurs ne sont absolument pas habitués et dont je me demande si nous avons raison d’en rechercher l’origine dans je ne sais quelle culpabilité coloniale ».

Et d’enchaîner : « N’y a-t-il pas un risque de voir l’esprit de pénitence alimenter et légitimer le ressentiment ? » Mais la réalité des discriminations ? « Y a-t-il discrimination à l’embauche, s’interroge-t-il, quand quelqu’un arrive encapuchonné et qu’il n’a pas d’autre langue à sa disposition que le “parler banlieue” qu’on entend dans L’Esquive ? » Il faut, dira-t-il en conclusion, « ne pas donner à ces paumés une mentalité d’ayants droit ».

  • A qui fera-t-on croire que le port de la capuche et le parler 9-3 expliquent l’absence d’emploi pour la moitié ou plus des jeunes de cité d’origine arabe ou africaine ?

Le système… « On se place d’entrée de jeu, rétorque le philosophe, dans la posture de celui qui est une victime du chômage et du racisme. Je ne suis pas sûr que tout ce discours-là favorise vraiment la réconciliation. »

Même la ghettoïsation, à ses yeux, résulterait parfois d’une « espèce de nettoyage ethnique » organisé par la pègre pour « rester entre soi ».

C’est à de pareilles idioties qu’on mesure le sérieux de phrases pontifiantes du type : « L’antiracisme est une démarche fondamentale. Il ne faudrait pas qu’il devienne une idéologie et un alibi. »

D’autant que, quelques minutes plus tôt, Finkielkraut n’avait pas hésité à se transformer en propagandiste : « Nous vivons dans une situation tout à fait étrange où la diabolisation s’est déplacée. Et Le Pen en profite. Si aujourd’hui, l’antiracisme a un diable, c’est Nicolas Sarkozy. »

[…]

Dans le 9-3, on appelle ce genre de personnage un « bouffon ». On sait maintenant que c’est celui du roi. Ou plutôt de celui qu’il espère voir régner…


Dominique Vidal. Le Blog du Monde Diplomatique. Titre original : « Alain Finkielkraut, bouffon du roi ». Source (Extrait – apparemment lecture libre)


  1. Lire respectivement « Banlieues : qui a dit…? » et « Italie : le racisme à l’honneur », « La valise diplomatique », 23 novembre et 15 décembre 2005.
  2. Coll. « Tapages », Hachette Littératures, Paris, 2006. Lire « Critique du “chauvin cosmopolite” », par Alain Gresh, Le Monde diplomatique, janvier 2007.
  3. Seuil, Paris, 2006.
  4. Il a notamment reproché aux contempteurs de l’esclavage d’« oublier » la traite arabe et de viser en fait les juifs. Le Monde diplomatique a d’ailleurs traité de l’un et l’autre sujets : Elikia M’Bokolo, « La dimension africaine de la traite des Noirs », avril 1998, et Steven Hahn, « Approches américaines de l’histoire de l’esclavage » et « Un bobard antisémite », mai 2006.
  5. La Discorde. Israël-Palestine, les Juifs et la France, Mille et une nuits, Paris, 2006.

Une réflexion sur “Le bouffon du roi

  1. jjbey 24/01/2021 / 9h24

    Comme quoi la bêtise n’épargne aucune couche de population souvent animée par la haine, celle de l’autre, cet inconnu qui forcément ne vous veut que du mal…..Les Lumières n’ont pas forcement éclairé tout le monde.

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