Le 49.3, le calibre qui tue

Pour faire voter la réforme  des retraites, le gouvernement envisage-t-il de recourir au fameux article 49.3 (qui permet l’adoption sans vote du Parlement d’un texte dans son intégralité, en l’absence de l’adoption d’une motion de censure) ? C’est la question qui est sur toutes les lèvres des parlementaires, à deux semaines de l’examen du projet de loi dans l’hémicycle.

Le dépôt de 19.713 amendements par La France insoumise, qui a pour objectif revendiqué de bloquer les travaux du Parlement, ne laisse pas à l’exécutif une grande marge de manœuvre. Entre le 17 février, date du début de la discussion en séance, et le 9 mars, date de l’interruption des débats pour cause de campagne municipale, il n’y a guère que vingt jours, dimanches compris.

Or Macron veut à tout prix que la réforme soit votée avant les municipales, pour pouvoir passer à d’autres réjouissances. En petit comité, la semaine dernière, Edouard Philippe a calmé ses troupes : « Ne confondons pas vitesse et précipitation. Je ne crois pas au 49.3, aujourd’hui. On doit montrer qu’on n’a peur de personne sur la réforme des retraites. Les Français jugent sévèrement ceux qui tripatouillent et jouent à l’obstruction. Laissons les Insoumis jouer aux irresponsables, ça leur va bien. »

Traduire : pas question de dégainer immédiatement le 49.3, mais après deux semaines de pagaille parlementaire, on verra. Le 1er février, devant des conseillers, Macron a d’ailleurs mis les points sur les « i ».

« Le droit d’amendement est fondamental, a-t-il martelé, mais le détourner en pratiquant l’obstruction le met en danger. Je vous le dis, la loi sera votée dans les délais prévus. J’ai engagé le gouvernement à utiliser tous les moyens nécessaires pour combattre l’obstruction. »

Autrement dit le passage en force avec l’usage, s’il le faut, de l’article 49.3. Lequel, entre parenthèses, permettra à l’opposition de crier à la dictature…


Article non signé, paru dans « le Canard enchaîné » du 05/02/2020


2 réflexions sur “Le 49.3, le calibre qui tue

  1. jjbey 05/02/2020 / 18h22

    Quand les syndicats font des propositions on les ignore et on crie au désordre quand ils appellent à la grève, quand les parlementaires ne sont pas entendus et qu’ils se trouvent obligés de bloquer la machine pour empêcher l’irréparable de se faire on crie à l’obstruction.
    Autrement dit quelque soit les moyens utilisés pour dire non à ce projet de retraite on vous ignore et on vous blâme car seul le pouvoir a raison. Parlementaires, citoyens fermez là.
    C’est la démocratie .

  2. bernarddominik 05/02/2020 / 18h38

    L’article 49-3 de la constitution pose un vrai problème de démocratie : il n’y a pas de majorité pour une loi, mais pas non plus pour faire chuter le gouvernement. La loi devrait être retirée. Mais je ne comprends pas que l’opposition n’ait pas mis l’accent sur ce qui ne va pas dans cette loi. Elle sait qu’elle sera votée, alors pourquoi n’avoir pas fait les amendements qui la rendent acceptable: une vrai universalité, remettre la limite de cotisation à 28000€, tenir compte de la pénibilité et de la dangerosité, de l’espérance de vie en fixant une durée moyenne minimum de retraite,… La retraite par points favorise les carrières longues, en général les métiers les plus durs. Le problème c’est que ce sont eux qui sont les moins syndiqués, les syndicats préfèrent défendre leurs adhérents, les autres ils s’en foutent.

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