Un plan bidon

Il n’y a pas qu’en Australie que l’atmosphère est irrespirable.

Depuis une semaine, le torchon brûle entre le ministre de l’Agriculture et sa collègue de la Transition écologique.

Tout ça parce que nos agriculteurs ont aspergé à tout-va les champs de pesticides et qu’Élisabeth Borne en a profité pour faire de l’ agribashing : « II faut se rendre à l’évidence : la politique mise en œuvre depuis désormais plus de dix ans ne produit pas les résultats espérés, dans le secteur agricole. Ceci doit nous conduire à réinterroger, en profondeur, cette politique. »

Il est vrai que les derniers chiffres, publiés le 7 janvier, sont un pavé dans la mare aux pesticides.

En 2018, les achats d’insecticides, fongicides et autres herbicides ont fait un bond de 24 % par rapport à 2017, avec 85.000 tonnes pulvérisées. Pire, « les substances les plus dangereuses, étiquetées cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction ont quasiment doublé, pour atteindre 5.500 tonnes », s’agace François Veillerette, directeur de l’ONG Générations futures.

La ministre de l’Écologie est d’autant plus furax que l’ambitieux plan français de réduction des pesticides, lancé en 2008, après le fameux Grenelle de l’environnement, promettait pour 2018 une diminution de 50% de la quantité épandue.

Le recours aux produits phytosanitaires, qui devait diminuer de moitié en dix ans, aura augmenté de 25 % !

On en est déjà à la troisième version du plan Écophyto, avec chaque fois un report de l’échéance (aujourd’hui, 2025) et la certitude de ne pas y arriver.

Pourquoi ?

Parce que, sous la pression de la FNSEA, le premier syndicat agricole, chantre du productivisme, le ministère de l’Agriculture n’a jamais voulu imposer de contraintes ni même de sanctions aux agriculteurs accros au pulvérisateur.

Les six ministres qui, depuis 2008 se sont succédé à l’hôtel de Villeroy ont tous cru comme un seul homme à l’autorégulation. Dans un audit rendu l’an dernier, la Commission européenne détaillait cruellement le ratage, tout en l’imputant principalement au manque de coercition (« Conflit », 3/4/19).

Le plan bidon aura tout de même coûté 700 millions d’euros.


3 réflexions sur “Un plan bidon

  1. bernarddominik 18/01/2020 / 17h23

    Personnellement j’appellerais cet article « le suicide des agriculteurs ». Car non seulement ils pourrissent les terres qui les font vivre, empoisonnent les consommateurs, mais en plus s’intoxiquent gravement. Quand plus personne ne voudra acheter leur maïs et leur blé gavés de pesticides que feront ils?

  2. fanfan la rêveuse 18/01/2020 / 18h41

    Encore un bien triste constat…
    Je ne comprends pas les agriculteurs, pour en avoir parlé avec quelques uns, dans leur discours il n’y a pas de danger en pulvérisant ces produits. J’avoue être surprise par cette façon de penser.
    Ensuite il remonte un autre argument, que je comprends parfaitement à l’inverse, si les agriculteurs français seulement appliquent cette réglementation ils vont droit dans le mur. Il faut donc un travail au niveau européen, mais là ce n’est pas gagné…

  3. jjbey 18/01/2020 / 22h45

    Rien n’est gagné d’avance mais il faut bien commencer par quelque chose et si dans le même temps on interdit l’utilisation des poisons et l’importation de tout ce qui est produit, d’où que cela vienne, avec ces mêmes poisons il n’y aura plus de concurrence faussée. (c’est bien dans un traité européen la concurrence libre et non faussée)………………….

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