Les mystères de l’« effet placebo »

Les facteurs psychologiques, dont l’effet placebo fait partie, sont déterminants dans l’amélioration de l’état d’un patient.

Le neurologue, neuropsychiatre Alain Autret détaille les principes de ce phénomène considéré par la médecine, qui présente toutefois d’importantes zones d’ombre, …

Tous les enfants le savent : souffler sur un bobo ou recevoir un « bisou magique » permet aussitôt de se sentir mieux Le mystère de ce pouvoir, détenu par une grande majorité des parents, est décrypté plus tard par les petits : il s’agit du fameux effet placebo. « Si vous prenez un sucre et que l’on vous dit que ce sucre va améliorer votre douleur : la gêne va forcément diminuer. Le cerveau est en effet si puissant qu’il peut conditionner nos symptômes», explique Alain Autret, neurologue-neuropsychiatre auteur du livre Les effets placebo : Des relations entre croyances et médecines.

Le professeur émérite à l’université François Rabelais de Tours et ancien chef de service de neurologie rappelle que ce phénomène « correspond aux modifications bénéfiques psychologiques et physiologiques ressenties par un patient après l’administration d’une substance ou la réalisation d’un acte thérapeutique qu’il juge bénéfique, indépendamment de l’efficacité intrinsèque du traitement ».

L’évolution positive des symptômes d’une maladie s’explique par trois facteurs : « la guérison spontanée la fin d’une grippe, la disparition d’une bosse ou d’un hématome ; un traitement thérapeutique efficace, appelé « l’effet verum », et enfin les effets psychologiques ». Alain Autret insiste d’ailleurs sur le rôle considérable des facteurs psychologiques dans l’effet de tout traitement.

« Le fait de pouvoir parler de ses symptômes et d’être écouté est déterminant dans leur amélioration. Mais il est très difficile de soigner uniquement par la parole. Pouvoir s’appuyer sur un intermédiaire, quelque chose de concret, s’avère souvent très utile », ajoute le spécialiste en rappelant le rôle du placebo comme support à une prise en charge psychologique.

Efficace même lorsque les patients sont mis au courant

Les connaissances sur ce procédé thérapeutique restent encore très limitées. « Les revues internationales montrent l’étendue des zones d’ombre, ajoute Alain Autret. Scientifiquement, il a été démontré que l’efficacité d’un placebo provient notamment de la réaction de notre cerveau, qui libère des neurotransmetteurs aux vertus antalgiques de l’ordre de la récompense (la dopamine et l’endorphine). Mais la modification du fonctionnement cérébral va en réalité bien plus loin et ceci, reste à préciser. »

Il existe notamment de plus en plus de recherches effectuées sur les placebos dits ouverts, des essais pour lesquels les patients sont informés de l’inefficacité prouvée de la substance qui leur est administrée. « Là encore l’effet placebo est meilleur que le non traitement. Mais le choix des mots s’avère prépondérant. Le patient réagira différemment si on lui parle d’un médicament inefficace, ou s’il entend plutôt : je vais vous donner un produit qui n’aura pas d’effet sur votre symptôme mais qui peut induire une modification psychologique… »

Les effets psychologiques associés à toute thérapeutique sont une réalité incontournable. « Leur prise en compte, reposant sur des bases scientifiques, est insuffisamment familière au monde des soignants. »


Capucine Bordet – Revue « L’ESSENTIEL de la CCMO ». Déc. 2019


2 réflexions sur “Les mystères de l’« effet placebo »

  1. tatchou92 10/01/2020 / 22h33

    Utilisons encore et toujours cet effet placebo pour celles et ceux qui ont besoin d’être apaisés, et qu’on leur apporte un peu d’attention. J’ai eu l’opportunité de le vérifier professionnellement auprès de malades qui n’avaient pas ou peu de visites et d’enfants qui avaient besoin d’un câlin pour s’endormir loin de maman. Une main apaisante et douce peut beaucoup, mais aujourd’hui, qui en a le temps à l’hôpital ou en maison de retraite ?

  2. fanfan la rêveuse 11/01/2020 / 18h45

    Bonjour Michel,
    Nul besoin de me convaincre, je le suis déjà, je sais combien notre cerveau est puissant et peut agir sur notre corps.
    Il est bien des maladies qui n’ont pas besoin de médicaments mais juste un peu d’écoute, d’attention ou d’une visite chez le spy.

    Bonne soirée Michel ! 🙂

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