Jean-Baptiste Djebbari

Le jeune secrétaire d’état aux Transports et ancien pilote s’agite beaucoup pour faire décoller sa carrière.
Secrétaire d’état aux Transports depuis septembre, Jean-Baptiste Djebbari ne déteste pas se faire appeler « Djeb » et a une sacrée pêche, ces temps-ci. C’est bien simple, on ne le tient plus ! Il saute d’une émission à l’autre, bombe le torse que ses années de rugby ont déjà bien développé, sourit avantageusement. Il dort peu, comme Jupiter, son idole, et, tel le lapin Duracell, ne s’arrête jamais.
Le 5 décembre, premier jour de grève, il était sur le pont à 6 heures du mat avec des agents de la RATP, puis il a répondu, deux heures plus tard, aux questions des auditeurs de RTL, avant d’organiser une conférence de presse au ministère, de se montrer aux côtés du personnel de la SNCF à Saint-Denis et de finir la journée sur le plateau de l’émission de Cyril Hanouna.
Ses amis susurrent : « Il est l’homme qui monte, en Macronie. »
Son entourage confie à l’AFP : « Il sent qu’il a un rôle à jouer dans un temps assez fort du quinquennat. » Diantre. Il est bien naturel que le jeunot (il n’a que 37 ans), passé par l’Enac, l’École nationale de l’aviation civile, soumis à une telle pression, commette quelques bourdes. La dernière n’est pas mal, dans le genre.
Très sûr de lui, Djeb a affirmé, la semaine dernière, que « l’ensemble des Français qui ont un billet aur[aie]nt un train garanti » pour les départs en vacances à Noël.
Pourtant, la SNCF a bien précisé que seulement 68 % des voyageurs auraient cette chance. Ce qui n’empêche pas le cabinet de l’homme-qui-monte-en-Macronie d’affirmer que le secrétaire d’Etat « n’a pas fait d’erreur » et « dit la même chose que la SNCF ». A force de le répéter, ça finira peut-être par être vrai.
Plaire à tout le monde
Djeb, un rien bravache peut-être, aime montrer qu’il est un bonhomme. Il y a quelques jours, il se pointe devant des cheminots de SUD-Rail, les caméras sur ses talons. Le voilà qui lance : « Un, je vous respecte. Deux, nous sommes en total désaccord. Trois, le gouvernement est déterminé à faire cette réforme. »
Commentaire d’un député macroniste partisan du dialogue : « Voilà le genre d’intervention qui mériterait un remontage de bretelles de l’Elysée ou de Matignon. Le gars agite un chiffon rouge et excite les cheminots pour le seul plaisir de se mettre en scène. »
Pour devenir le chouchou du Président, qui dit de lui : « Il piaffe, mais c’est un bon », ce qui ne lui vaut pas que des amis, Djeb s’est beaucoup démené. Rapporteur du projet de réforme ferroviaire à l’Assemblée, le député de la Haute-Vienne a réussi à se mettre dans la poche Elisabeth Borne. Celle que Macron trouve « un peu terne » ne disait que du bien de Djeb jusqu’au jour où il est devenu son ambitieux secrétaire d’Etat.
Djebbari a rencontré le futur président en 2015 par l’intermédiaire du socialiste Bruno Le Roux, lui aussi fondu d’aviation. Il est ensuite devenu pote avec tous les cadets de la Macronie : Stanislas Guerini, patron de LR-EM ; Pierre Person, numéro deux du parti ; et les députés Sacha Houlié, Aurélien Taché, ainsi que Stéphane Séjourné, ancien conseiller politique de Macron à l’Elysée, devenu député européen. Djeb a compris que, dans la vie, il ne fallait jamais négliger non plus les tenants de l’ « ancien monde ». Il les consulte donc et les salue avec déférence.
Sur les conseils de Darmanin, il est allé voir Sarko dans ses bureaux de la rue de Miromesnil. Il a pris des notes et a fait savoir qu’il l’avait trouvé « extraordinaire ». Il consulte aussi Dominique Bussereau et Jean-Claude Gayssot, on n’est jamais trop prudent.
Le taurillon de la Haute-Vienne a tendance à enjoliver son CV. Il omet de préciser, quand on le présente comme un « pilote de ligne », qu’il est titulaire d’un brevet CPL (Commercial Pilote Licence), donc pilote… d’aviation d’affaires. Sur le site du gouvernement, il est pourtant présenté comme « pilote de ligne au sein de la compagnie Net-Jets » de 2008 à 2010. Et il confirme au « Canard » avoir suivi la formation de pilote de ligne et volé « 2.000 heures sur avions légers », mais sans avoir passé la licence pratique qui lui permettrait de piloter des avions de ligne commerciaux de type Airbus ou Boeing. Pour son atterrissage électoral, il envisage plusieurs pistes.
Président de région, sinon rien
Le jeune Djeb, qui a médité les leçons de ses aînés, sait qu’il lui faut désormais un ancrage local solide. Il a, un temps, envisagé de se présenter aux municipales à Limoges, confiant à « La Dépêche » avoir « pris le leadership du projet municipal ». L’ennui, c’est qu’un sondage récent crédite le « leader » de 10 % des voix. Il a sagement renoncé : « Ma fonction au gouvernement me demande beaucoup de concentration. »
Désormais, il se voit président de la région Nouvelle-Aquitaine, et le fait savoir.
Interrogé par « Le Canard », Alain Rousset, l’actuel titulaire du poste, reste calme « J’ai lu ça quelque part, et j’ai passé l’âge d’être inquiet. »
C’est vrai qu’avant de grandir Djeb va sans doute devoir un peu désenfler.
Anne-Sophie Mercier. Le Canard enchaîné. 24/12/2019
Oui il faudra que ses chevilles désenflent.
Mais la république a toujours eu de ces jeunes ambitieux, rêvant d’un avenir bonapartiste ou jupitérien.
Lui et ses compères ont fait d’une idée de justice sur la retraite une pantalonnade dont on découvre, dans les détails, les arrières pensées guidées par Larry Fint patron de bkackrock : en limitant la cotisation des cadres à 10.000€ (au lieu de 27.000€), c’est 5 milliards de moins de recettes par an, alors qu’il faudra continuer à financer les grosses pensions, car la limite à 10.000€ ne s’appliquera qu’aux futurs retraités dans un demi siècle.
Si on rajoute toutes les exceptions déjà actées, ce système ne sera pas viable financièrement.
C’est une façon vicieuse de tuer un système qui marche (à condition d’arrêter les exemptions de charges) pour le remplacer par un autre, meilleur sur le papier, mais saboté dès sa création.
Macron joue habilement sur les privilèges qui font que ce sont les moins bien lotis qui financent les mieux lotis, pour finalement proposer un système où les nouveaux privilégiés sont les défenseurs du pouvoir.
C’est remplacer une république prébendière par une république bananière.