Non, l’Holocauste n’est pas une création du mufti de Jérusalem et Benny Gantz ne menace pas la sécurité d’Israël, comme a pu le dire Benyamin Nétanyahou.
Non, il n’y avait pas foule lors de l’investiture de Donald Trump sur le National Mall à Washington et oui, Barack Obama est né aux États-Unis, contrairement à ce qu’a pu affirmer le président milliardaire.
Mais qui s’en soucie vraiment aujourd’hui ? C’est toute la question, au cœur de notre dossier cette semaine.
Depuis 2015, Courrier international est partenaire du « off » du Forum mondial de la démocratie.
Chaque année, nous organisons, en partenariat avec la Ville de Strasbourg, des débats, projections, ateliers et tables rondes autour du thème de la démocratie.
Le sujet retenu pour cette édition 2019 (du 2 au 8 novembre) : “Information : la démocratie en péril ?”
C’est dans ce cadre que nous avons choisi de consacrer notre une à la désinformation et à son impact sur les démocraties – avec un titre un brin provocateur, sans doute, mais qui traduit bien une réalité profonde dans nos sociétés.
Comme l’écrit la sociologue Eva Illouz, l’auteure du très long papier que nous avons retenu dans le dossier : « Notre époque est marquée par le recul sans précédent d’un des principaux héritages des Lumières : la vérité en tant que pilier moral et politique. »
Plutôt qu’une démonstration des techniques qui rendent possibles la falsification de l’information (de Photoshop aux « deep fake », plus récemment) ou qu’une énième énumération des dernières fake news colportés par un Donald Trump ou un Boris Johnson, nous avons privilégié un texte de réflexion autour de la notion de vérité.
« Si le mensonge est si répandu aujourd’hui dans l’espace public, c’est parce qu’il est désormais impuni et, plus inquiétant, parce qu’il semble souvent rapporter gros », avance Eva Illouz dans son article.
Elle explique comment, peu à peu, nous avons fini par nous désintéresser de la notion même de vérité.
La démultiplication des médias, mais aussi le culte de l’émotion et de la subjectivité, la survalorisation de l’individu au détriment du groupe, les théories du complot… ont fini par nous persuader qu’il existe plusieurs vérités et que, s’il y en a bien une qui mérite d’être contestée, c’est celle du pouvoir. Et parfois, aussi, celle des médias.
[…] Claire Carrard. Courrier international. Titre original : « Ces mensonges qui nous gouvernent ». Source (extrait)