Provocation

Un État qui, sans motif réel, dénonce un accord international de désarmement qu’il a longuement négocié peut-il ensuite menacer d’agression militaire un autre État signataire ?

Peut-il ordonner à tous les pays de s’aligner sur ses positions capricieuses et belliqueuses, faute de quoi eux aussi subiront des sanctions exorbitantes ? Quand il s’agit des États-Unis, la réponse est « oui ». […]

Cherchez des prétextes, je me charge de la guerre.

M.  John Bolton, (Conseiller à la sécurité nationale du président Donald Trump), ne manque ni d’expérience ni de suite dans les idées.

En mars 2015, alors que son fanatisme en faveur de l’invasion de l’Irak a amoindri son influence, il publie dans le New York Times une tribune intitulée : « Pour arrêter la bombe iranienne, il faut bombarder l’Iran ». Après avoir prétendu que Téhéran ne négocierait jamais la fin de son programme nucléaire, il conclut : « Les États-Unis pourraient effectuer un travail soigné de destruction, mais seul Israël peut faire ce qui est nécessaire. (…) L’objectif sera le changement de régime à Téhéran (1).  »

Quelques mois plus tard, un accord nucléaire avec l’Iran était signé par toutes les grandes puissances, États-Unis compris. Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique, Téhéran en a respecté scrupuleusement les termes.

Pourtant, M. Bolton n’en démord pas. En 2018, devançant les positions va-t-en-guerre du gouvernement israélien et de la monarchie saoudienne, il tient toujours autant à son « changement de régime » : « La politique officielle des États-Unis, écrit-il alors, devrait être la fin de la révolution islamique iranienne avant son quarantième anniversaire. Cela laverait la honte d’avoir eu nos diplomates retenus comme otages pendant quatre cent quarante-quatre jours. Et ces anciens otages pourraient couper le ruban lors de l’inauguration d’une nouvelle ambassade à Téhéran (2).  »

L’actuel président des États-Unis a fait campagne contre la politique des « changements de régime », c’est-à-dire des guerres d’agression américaines. Le pire n’est donc pas encore certain. Mais la paix doit être bien fragile pour qu’elle semble ainsi dépendre de la capacité de M. Trump à maîtriser les conseillers enragés qu’il a nommés.

En asphyxiant économiquement l’Iran avec le concours des capitales et des grandes entreprises occidentales (contraintes et soumises), Washington prétend que son embargo obligera Téhéran à capituler. […]

Triste monde où tout se résume à la libre circulation du capitalisme, surtout venant des États-Unis


Serge Halimi. Le Monde Diplomatique. Titre original : « l’art de la provocation ». Source (extrait).


  1. John Bolton, « To stop Iran’s bomb, bomb Iran », The New York Times, 26 mars 2015.
  2. John Bolton, « Beyond the Iran nuclear deal », The Wall Street Journal, New York, 15 janvier 2018.

2 réflexions sur “Provocation

  1. bernarddominik 09/06/2019 / 16h53

    Trump a inauguré une nouvelle politique :le non respect des accords signés.
    Cela signifie que la signature des USA n’a plus de valeur.
    En termes de diplomatie c’est une évolution sans précédent.
    Qui voudra signer un accord avec un pays qui n’a pas de parole ?

  2. jjbey 09/06/2019 / 23h18

    Trump c’est Trompe. Il faut commencer par ses électeurs, continuer par ses alliés qui ne peuvent même plus vendre une paire de sandalette aux iraniens. Qui fait monter le prix du pétrole en interdisant les exportations iraniennes? Du Venezuela ? Tiens, là aussi. Qui renie les accords avec Cuba? qui…..Triste sir dangereux pour la paix, c’est vrai que la guerre c’est le bonheur des capitalistes. Bonne nuit les petits………..

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