Hôpitaux. Les services d’urgence malade !

A force de répéter depuis des années que les urgences hospitalières sont au bord de l’asphyxie, le malaise atteint désormais son paroxysme.

Dans la nuit de lundi à mardi, l’équipe de nuit des urgences de l’hôpital Lariboisière à Paris s’est ainsi collectivement mise en arrêt maladie et ne s’est pas présentée, obligeant l’équipe de jour à rester sur place.

Un fait inédit […] qui souligne l’ampleur du ras-le-bol.

 «C’est inhabituel, confirme un urgentiste de garde lundi soir dans un autre hôpital parisien. Quand on a entendu que Lariboisière renvoyait sur d’autres hôpitaux, on a cru qu’un fou les avait encore tapés ou qu’un soignant s’était suicidé.»

Déjà, la semaine dernière, à Lons-le-Saunier (Jura), (Voir le PDF LIENAttention il faut avoir au moins Adobe pdf (gratuit) pour lire l’article) le préfet avait dû réquisitionner des professionnels de santé en pleine nuit pour assurer les urgences de l’hôpital et remplacer des soignants en arrêt de travail.

«C’est un tournant historique dans le conflit. Les personnels en ont tellement marre que, d’un coup, ils renoncent», explique Patrick Pelloux, président emblématique de l’Association des médecins urgentistes de France (Amuf). Car le mouvement de grève aux urgences dure depuis plus de deux mois.

Entamé mi-mars, après une série d’agressions à l’hôpital parisien Saint-Antoine, il a essaimé dans des dizaines d’établissements partout en France. L’initiative a fait tache d’huile, d’abord au sein des Hôpitaux de Paris (AP-HP), où les soignants ont créé le collectif Inter-Urgences, puis n’a cessé de s’étendre.

Mardi après-midi, près de 80 services d’urgences étaient en grève. Et une manifestation est prévue jeudi à Paris, en plein congrès des urgentistes, où Agnès Buzyn n’a pas confirmé sa venue. […]

Le service des urgences est le dernier réceptacle de la misère sociale

Mais si la ministre dit «comprendre l’impatience» des personnels des urgences qui sont «dans un état de saturation», elle se refuse à cautionner la méthode qui revient à «dévoyer un arrêt maladie» et «reporter sur d’autres une surcharge de travail».

Un reproche qui, chez les intéressés, passe mal. «Dès qu’un service à l’hôpital est saturé, ou ferme la moitié de ses lits parce que le personnel part en congés, c’est nous, les urgences, qui devons assumer toutes les défaillances et faire le tampon. La surcharge, on la gère tout le temps!», explique un urgentiste. […]

[…] «Il faut des heures pour joindre le 115 et à 1 heure du matin, ils n’ont plus de place en foyer. Donc nous accueillons aux urgences les SDF, les femmes battues, les familles de migrants», explique un médecin. Sans oublier la violence quotidienne qui ajoute au stress des personnels. […]


Marie-Cécile Renault. Le Figaro. Titre original : « La grève des services d’urgence s’étend et prend une forme inédite ». Source (extrait)


Il faut d’urgence trouver des mesures pour désengorger « les services urgences hospitaliers » . Parmi elles, est bien à régler le problème de la désertification de la médecine de ville pour que des patients sans problèmes vitaux n’atterrissent pas aux urgences. MC

5 réflexions sur “Hôpitaux. Les services d’urgence malade !

  1. Pat 06/06/2019 / 17h10

    Voilà un sujet dont on a pas fini de parler ! et nous courons vers des catastrophes inévitables.

  2. jjbey 06/06/2019 / 17h18

    Comme tous les services publics l’hôpital est malade du fric et faire des économies signifie moins de personnels, moins de temps de repos, moins de moyens techniques pour accompagner les patients. S’il est vrai qu’un certain nombre de patients ne devraient pas se trouver aux urgences cela provient de l’absence de maisons médicales locales et rien n’est fait pour les organiser. Plus particulièrement on se trouve encore avec un refus de l’ordre des médecins de sectoriser ceux-ci ce qui pourtant améliorerait leur répartition sur le territoire.

  3. fanfan la rêveuse 07/06/2019 / 7h25

    Bonjour Michel,
    Un sujet qui année après année a pris de l’ampleur.
    Certains prennent les urgences pour une salle d’attente de consultation, j’avoue ne pas les comprendre. Par contre lorsqu’il faut attendre presque 1 semaine (voir plus) pour avoir un rendez-vous, vous avouerez que votre consultation ne doit pas être urgente…
    Nous avons un manque crucial de médecin mais ce qui ne va pas, c’est bien le nombre d’heure de travail des remplaçants de nos vieux médecins. Ils sont souvent remplacés par des jeunes femmes qui veulent avoir une vraie vie de famille, de ce fait elles travaillent moins.
    Et puis nos médecins ne font plus de garde, alors direction les urgences pour parfois des choses qui peuvent attendre. Je vous parle ici Michel de notre vécu en milieu rural, il y a donc un déséquilibre que paie les urgentistes…

    J’ai le sentiment de voir sombrer peu à peu, corps de métier après corps de métier notre société qui tournait si bien…

    Belle journée à vous Michel ! 🙂

    • Libres jugements 07/06/2019 / 11h16

      Désolé je n’ai trouvé que cela comme réponse Françoise … La vérité !
      Bonne Journée
      Le numerus clausus en médecine : chronique d’une catastrophe annoncée

      La France a su créer les conditions idéales d’une pénurie de médecins alors que les besoins médicaux n’ont jamais été aussi hauts.

      Si les pénuries de médecins et les délais d’attente ubuesques sont devenus au fil des années une réalité du quotidien pour les utilisateurs du système de santé français, ces désagréments apparaissent bien faibles au regard de ce qui se prépare. Comme nous allons le voir, la pénurie de praticiens n’est pas près de s’arranger.

      En France, le nombre d’admis en deuxième année de médecine est contrôlé chaque année par le gouvernement grâce au système du numerus clausus. Ainsi, peu importe la note obtenue à l’examen, un étudiant en médecine ne pourra passer en 2ème année que s’il se classe parmi les 8 000 premiers (numerus clausus de 2012). Ce quota, appelé numerus clausus, est fixé chaque année de manière relativement arbitraire par les facultés sous la houlette du ministre de l’Enseignement supérieur. Au passage, les étudiants en médecine ne sont pas les seuls à y être confrontés puisque toutes les professions de santé réglementées y sont soumises (médecin, pharmacien, dentiste, sage-femme, infirmière, kiné, etc.). Et, comme le montre le graphique suivant, le quota annuel d’admissions a connu une franche baisse pendant 25 ans avant de commencer à remonter au début des années 2000 :
      numerus clausus

      Seulement voilà, comme le pointe très bien l’Institut de Recherche et Documentation en Économie de la Santé (IRDES), on ne peut pas maintenir un numerus clausus ridiculement bas sans provoquer de risque de pénurie, sans compter que d’une part la population française n’a pas cessé d’augmenter depuis et que d’autre part la proportion de senior a explosé (les séniors requérant plus de soins je le rappelle).

      Pour faire simple, la demande à laquelle notre système de santé est soumis a bondi alors que l’offre de médecins fraîchement diplômés s’est effondrée comme le montre la courbe du nombre de diplômés en médecine en France.

      Certes, il semblerait que les pouvoirs publics commencent à prendre conscience de la situation. En effet, on remarque une augmentation constante du numerus clausus entre 2001 et aujourd’hui. Augmentation qui nous ramène – tenez-vous bien – au niveau des années 70, alors que, comme nous l’avons vu plus haut, la population a augmenté mais aussi bien vieilli entre temps.

      Allons donc voir chez nos voisins combien de médecins fraîchement diplômés sortent de leurs écoles et comment ces derniers s’apprêtent à faire face au défi du vieillissement de la population. L’OCDE mesure chaque année ce chiffre dont les résultats complets les plus récents pour tous les pays datent de 2007 :

      diplômés médecine OCDE

      Comme par hasard, la France se classe parmi les derniers avec 6 diplômés par tranche de 100 000 habitants quand la moyenne de l’OCDE est à 9,6, soit 60 % de plus !

      Pour n’arranger en rien la situation, une bonne partie des praticiens français sont désormais à quelques années de la retraite, l’âge moyen pour les praticiens en activité régulière s’établissant à 50 ans d’après le conseil national de l’Ordre des Médecins (Cnom). Dans ces conditions, les prévisions d’effectifs du Cnom sont tout bonnement alarmantes, malgré le fait que 27 % des nouveaux inscrits à l’Ordre soient des médecins ayant été formés à l’étranger.

      Une fois encore, grâce à un cocktail détonnant d’ignorance crasse, de corporatisme éhonté et de dirigisme sans borne, la France, par l’intermédiaire de son gouvernement, a su créer toute seule les conditions idéales d’une pénurie de médecins alors que les besoins médicaux n’ont jamais été aussi hauts.
      Kevan Saab. Source avec diagramme https://www.contrepoints.org/2013/12/20/150654-le-numerus-clausus-en-medecine-chronique-dune-catastrophe-annoncee

  4. tatchou92 08/06/2019 / 16h02

    Il n’y a pas plus sourd que celui qui ne veut entendre…
    Les premières fermetures de lits d’hôpitaux remontent à Madame Simone Veil, Ministre de la Santé du Président Giscard d’Estaing.. et çà continue, avec les hôpitaux locaux, les maternités, oui, notre santé est en danger !
    Il n’y a pas eu non plus, effectivement, comme le montre Michel, d’anticipation sur la formation des professionnels de santé..On semble découvrir qu’ils et elles surtout, ne veulent plus être taillables et corvéables, qu’elles aspirent aussi à une vie de famille, sociale, culturelle, sociale et sportive, préfèrent aussi le travail de groupe, qu’elles veulent des établissements scolaires de proximité pour leurs enfants.
    Les Elus locaux ont bien compris le problème, en mettant des locaux à disposition, en favorisant le regroupement de professionnels, sauvant aussi les pharmacies, et la vie de leurs communes.. et les déserts s’installent aussi dans nos banlieues..
    Il est grand temps d’écouter les professionnels, les représentants des patients, les élus, la population, de redonner de l’espoir et de la solidarité, dans le beau pays de Pasteur !

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