«Je veux réussir, furieusement, passionnément ce mandat »…
Tout en balayant la question « indécente » de la journaliste Laurence Ferrari (« Serez-vous candidat en 2022 ? ») lors de sa première conférence de presse en deux ans à l’Élysée, Emmanuel Macron a donné le 25 avril le ton pour la suite de son quinquennat.
Victime, comme tous les présidents de la République qui l’ont précédé, de la « malédiction des deux ans », le chef de l’État veut se refaire une santé. […]
Notre sondage exclusif BVA, réalisé pour le bilan de ses deux ans à l’Élysée, le montre : le pari est loin d’être gagné. Le chef de l’État, qui vient de célébrer dans la discrétion le deuxième anniversaire de son élection mardi 7 mai 2017, entame l’an II de son mandat très affaibli. Même si sa cote semble s’être stabilisée depuis l’ouverture du Grand débat le 15 janvier, il n’est soutenu que par 3 Français sur 10 qui conservent une bonne opinion de lui et a passé la quasi-totalité de la séquence allant de mai 2018 à mai 2019 sur un toboggan vertigineux : de l’affaire Benalla à la crise des « gilets jaunes », c’est un véritable cauchemar qu’a vécu Emmanuel Macron. […]
L’analyse détaillée de cette chute révèle un double mouvement : Emmanuel Macron a commencé par perdre le soutien des sympathisants socialistes au cours de la première année (passé de 88 % en mai 2017 à 31 % en avril 2018), conséquence sans doute inévitable de réformes jugées « libérales » comme la suppression de l’ISF, la « flat tax », l’assouplissement du code du travail.
La deuxième année du quinquennat a, elle, été marquée par des pertes significatives du soutien des sympathisants LR (- 18 points à 32 %) d’avril 2018 à avril 2019. Un recul sans doute lié aux couacs à répétition au sommet de l’État qui ont abîmé son image présidentielle et à une détérioration de la confiance dans sa capacité à réformer le pays et à maintenir l’ordre républicain. En deux ans, Emmanuel Macron a donc vu fondre à la fois le « en même temps » et le « et de droite et de gauche » qui constituaient son capital politique de départ et son originalité politique.
Notre sondage BVA donne des éclaircissements sur les causes de ce retournement de l’opinion. Le jugement des Français est sévère : en avril 2019, les deux tiers (65 %) se disent « plutôt mécontents » de son action (contre 57% il y a un an) et la « note » BVA attribuée à Emmanuel Macron sur sa politique s’enfonce nettement en dessous de la moyenne, passant de 8/20 à 7,1/20.
Les décrochages les plus importants sont observés chez les moins de 35 ans, les communes rurales et les villes moyennes, les employés et les ouvriers. Même une partie de ses électeurs du premier tour de la présidentielle se disent mécontents : 30% contre 60% seulement de satisfaits.
Maintenir le cap des réformes
De fait, quel que soit le domaine testé, une majorité de Français considère que l’action menée est « plutôt un échec ». Si des succès sont reconnus dans « la lutte contre le terrorisme » et « le rôle de la France à l’international », le jugement est sans appel sur tous les autres sujets avec une large majorité pour qui Emmanuel Macron a échoué :
- Croissance économique (58 %),
- Éducation (56 %),
- Sécurité (58%),
- Emploi (61%),
- Fiscalité (67%),
- Pouvoir d’achat (73%),
- Environnement (66%),
- Lutte contre le réchauffement (68%)
- Immigration (65%) !
Les Français, interrogés après la conférence de presse du 25 avril, ne tiennent aucun compte des mesures prises en faveur du pouvoir d’achat depuis le 10 décembre, dont l’addition chiffre pourtant à plus de 17 milliards d’euros d’après les calculs du gouvernement. Le chef de l’État semble rencontrer une grande difficulté à regagner la confiance des Français sur le bien-fondé de sa politique. […]
Mais le sentiment est tenace chez une majorité de Français que la politique menée reste injuste et que les mesures concédées ne suffisent pas à faire oublier l’image de « président des riches » tout comme les « petites phrases » qui ont donné du chef de l’État l’image d’un homme dur et éloigné du quotidien vécu par la majorité des Français qui se sont sentis méprisés.
Surtout, Emmanuel Macron ne parvient pas à convaincre que sa politique va profiter à tout le monde. […]
Philippe Mabille. La Tribune. Titre original : « Sondage exclusif : le bilan sévère des deux ans de Macron à l’Élysée ». Source (Extrait) l