Retraite : Vous la souhaitez sauce Delevoye, Macron ou Le Maire ?

Bien malin ceux qui aujourd’hui croient savoir ce que seront les retraites après 2020. Attendons les arbitrages. La seule certitude, la retraite ne sera absolument plus comme aujourd’hui, selon la grande volonté de la marchandisation !

Pourquoi Macron cache son jeu …

« Priorité à la réforme qu’on a déclenchée. N’en rajoutons pas sur l’âge légal de départ à la retraite et les 62 ans, alors que le système actuel pousse déjà à dépasser cet âge. » Emmanuel Macron était furibard, le 3 avril, d’avoir dû répéter à ses troupes la consigne qu’il avait passée sans succès la semaine précédente.

En fait, la « priorité» de Macron était de retenir Jean-Paul Delevoye. La charge du haut-commissaire à la réforme des retraites contre les « cons de Matignon », qui sabotent sa négociation avec les syndicats en rêvant à voix haute d’imposer une mesure d’âge, a fait du bruit dans le Landerneau macroniste. Une démission, que Delevoye a mise dans la balance, aurait été évidemment du plus mauvais effet en cette fin de grand débat, et Macron a dû payer de sa personne pour parer le coup.

Il reste, sur le sujet, une belle impression de pétaudière (une de plus) au sommet de l’Etat. Malgré la mise en garde du Président, l’aile droite du gouvernement, menée par Bruno Le Maire et par Gérald Darmanin, sous le regard bienveillant du Premier ministre, a poursuivi pendant plus d’une semaine son offensive médiatique pour remettre sur le tapis l’âge du départ à la retraite.

Au-delà de cette polémique qualifiée, à l’Elysée, de « désastreuse», tout le microcosme s’interroge sur la position exacte de l’exécutif. Un début de réponse tient sans doute dans les propos tenus par Macron, à la fin de la semaine dernière, en petit comité. « Laissons Delevoye travailler tranquillement et aller au bout de sa réforme (sous-entendu : qui a le mérite de mettre fin aux régimes spéciaux). Plus tard, il sera temps ou pas de s’interroger sur l’âge de départ à la retraite et sur la durée de cotisation. »

En réalité, le chef de l’Etat est convaincu que la « mécanique Delevoye» (le système par points) poussera automatiquement le travailleur à poursuivre ses activités au-delà de 62 ans. Mais que (la réforme Delevoye ne devrait entrer en vigueur qu’en 2025) peut se poser entre-temps un gros problème de financement. Déjà, les dernières prévisions du Conseil d’orientation des retraites annoncent un déficit supérieur à 4,5 milliards pour 2022.

2022, l’année où Macron ne voudra sûrement pas prendre sa retraite politique.

Une réforme inutile ?

La députée Marcheuse de Haute-Garonne Corinne Vignon est l’initiatrice d’une tribune hostile à une mesure d’âge sur les retraites, cosignée par 40 députés En marche !, qui a finalement été bloquée par le président du groupe, Gilles Le Gendre.

Dans un entretien accordé à « L’Opinion » (4/4), Vignon décrypte pourtant très bien la pensée de Macron sur le sujet : « Le futur régime universel en points, déclare-t-elle, permettra aux Français de choisir leur âge de départ en toute connaissance de cause, parce qu’ils seront informés du montant de leur pension s’ils partent à 62 ans, à 63 ans. Naturellement et sans aucune contrainte, ils seront, par ce biais, encouragés à partir à la retraite plus tard. ». Tout est dit.


En aparté de bon matin

Le débat sur la réforme des retraites s’était invite, le 2 avril, au petit déjeuner de la majorité à Matignon.

Premier des intervenants, Patrick Mignola, le patron des députés MoDem. « Je ne rencontre pas de gens sur le terrain, hormis des politiques ou des syndicalistes, qui bloquent sur les 62 ans », lance-t-il. Avant de préciser : « Au contraire, ils pensent tous qu’il faut cotiser plus longtemps, surtout si c’est pour loger leurs parents dans un Ehpad. »

Acquiescement de Philippe, mais bémol de Stanislas Guerini, le patron de LRM : « Il faut distinguer ce qui est de la réforme des retraites et ce qui est du financement de la grande dépendance. »

Marielle de Sarnez vient alors au secours de son camarade du MoDem : « Il faut se rappeler qu’en 1981 on travaillait jusqu’à 65 ans alors qu’on avait dix ans d’espérance de vie en moins. »

Marielle est d’ailleurs un exemple pour toutes et tous : à 68 ans, elle refuse de décrocher.


Articles lus dans le Canard enchaîné. 10/04/2019


8 réflexions sur “Retraite : Vous la souhaitez sauce Delevoye, Macron ou Le Maire ?

  1. bernarddominik 13/04/2019 / 16h46

    Le président a bien compris que l’âge de départ à la retraite est un faux problème. Le vrai problème c’est leur montant. En étant vent debout pour protéger les privilèges de quelques uns, les syndicats se sont discrédités aux yeux de tous ceux qui payent beaucoup pour toucher un peu. C’est à dire les cadres techniques du privé. Macron les avait séduits avec l’idée qu’un euro cotisé donnerait les mêmes droits à tous. Mais la polémique sur la réversion, puis le maintien des régimes spéciaux (alimentés pour les plus favorables par le régime général et le contribuable), montrent bien qu’il y a loin de la coupe aux lèvres, et qu’à force de manipulations, plus personne ne croit dans le projet initial de Macron. Il n’en reste pas moins vrai que si les cadres moyens du privé se tournent vers les assurances, le système est fini.

  2. jjbey 13/04/2019 / 22h57

    Pourquoi ne pas aligner toutes les retraites sur le plus favorable des régimes spéciaux ?
    Voire le système qui permet aux ministres, les présidents de la république, les retraites « chapeau » (comme celle de Ghosn – 70.000€ par mois) des retraites très supérieures même avec peu de cotisations …
    Sortons du piège de la division entre travailleurs qui permet de faire n’importe quoi et surtout une économie de 19 milliards sur le dos des retraités.

    FAUT BIEN QUE LES ACTIONNAIRES VIVENT!

  3. fanfan la rêveuse 14/04/2019 / 10h52

    Bonjour Michel,
    Les retraites !
    Il faut être lucide, il n’y a plus assez d’actif pour maintenir le régime.
    A cela il faut ajouter, les différents régimes et le fait que nos jeunes font de longues études. Et puis il y a aussi et ce n’est pas rien, le fait que nous vivons de plus en plus vieux. Il est donc plus qu’évident que nous avons un gros souci !

    Ce sujet est délicat, y toucher est une bombe, mais il va bien falloir trouver une solution…
    Travailler plus longtemps est certainement une solution, encore faut il le pouvoir, le marché du travail est il en mesure de le permettre, j’en doute.
    Mettre en place un seul et unique régime, une autre solution, mais cela va être difficile a faire accepter.
    Pourtant lorsque plus rien ne va, il faut être solidaire !
    Cotiser pour une assurance privée encore une autre, mais tout le monde ne peut se le permettre.
    Lorsqu’on a juste de quoi vivre, épargner n’est pas possible.
    Une certitude, je souhaite bien du plaisir à celui qui se frottera à ce sujet !

    Bonne journée Michel ! 🙂

    • Libres jugements 14/04/2019 / 12h58

      Bonjour Françoise,
      Peut-être avez-vous énuméré là, dans votre commentaire, tous les poncifs que l’on veut bien diffuser à longueur de médias, d’éditorialistes, d’économistes, des membres du gouvernement. En tout cas c’est ce qu’il veulent absolument diffuser.
      La vérité est peut-être toute autre, notamment que la branche retraite de la sécurité sociale (et je dis bien la branche retraite) n’est pas déficitaire loin de là. Sauf que lorsque l’on veut rendre déficitaire une branche on l’incorpore Dans un compte général comprenant la branche « santé » (tous les services publics de la santé sont hélas déficitaires dont les causes sont entre autres, les prix faramineux du matériel hospitalier, le coût de certains remèdes imposés par les laboratoires pharmaceutiques, etc.), mais également la branche « accidents du travail » dont on ne parle jamais mais qui est hélas également déficitaire.
      Maintenant un autre sujet est à mettre en avant, celui de l’aide aux familles n’ayant cessé de diminuer, qu’il y ait un ou plusieurs enfants au foyer, une situation qui dure depuis plusieurs décennies ne permettant pas de maintenir une population active suffisante à terme.
      Comme l’a souligné Jean-Jacques dans son commentaire, n’est-ce pas une honte lorsque l’on sait qu’un nommée ministre restant au minimum trois mois en fonction, touchera le restant de sa vie une retraite que bon nombre de salariés disposant du nombre nécessaire de trimestre ne toucheront jamais. Je parlerai aussi d’indécence devant cette honte des « parapluies retraites dorées » …

      Enfin je vais revenir à la genèse de la sécurité sociale du temps du ministre Ambroise Croizat qui au sortir de la guerre alors que l’économie française était à plus mal, a permis pendant longtemps à toutes les branches de la sécurité sociale à tous les salariés qui les salariés et le patronat qui y cotisaient, de permettre de se soigner et de vivre dignement de sa retraite. La grande différence est qu’à l’époque, les bénéfices après impôts sur les sociétés se situaient entre 2 et 8 %, alors aujourd’hui les actionnaires exigent de 15 à 25 %. Pour atteindre ces rendements toutes les charges sociales et les salaires ont été diminués, ainsi les rentrées de charges salariales ont diminué mettant les différentes branches de la sécurité sociale, en difficulté pour l’avenir.

      Vous souhaitant un bon dimanche à vous et aux vôtre Françoise
      Cordialement
      Michel

      • fanfan la rêveuse 15/04/2019 / 9h09

        En vous lisant je me dis où est la vérité ? A quand la transparence en ce cas ?
        Bonne journée Michel !
        🙂

        • Libres jugements 15/04/2019 / 21h21

          A vrai dire François je n’invente strictement rien dans les données signalées dans mon commentaire.
          vous pouvez trouver facilement les comptes de la sécurité sociale branche par branche et constater par vous-même, la véracité de mes affirmations à ce sujet. D’ailleurs la Cour des Comptes fait d’abord ce constat branche par branche mais additionne l’ensemble des branches pour en signaler les pertes.
          Quant à la politique pour la famille, vous êtes assez au fait de ce problème, Il y a lieu par contre de l’additionner au problème bien réel par contre du manque d’actifs dans la tranche des 20 35 ans … ce qui à terme nécessitera de décaler de plus en plus, la sortie des actifs au-delà des 63/65/68 ans

          • fanfan la rêveuse 16/04/2019 / 8h48

            Bonjour Michel,
            J’espère ne pas vous avoir blessé, si c’est le cas, je vous prie de m’en excuser.
            Je vous souhaite une très bonne journée ! 🙂

            • Libres jugements 16/04/2019 / 19h09

              Mais non Françoise, je ne suis nullement blessé.

              Je vous souhaite une bonne soirée et a bientôt pour lire vos commentaires.

              Cordialement
              Michel

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