Des bénitiers « estampillés » et attributifs

Si avec ça ils ne font pas des miracles…

Depuis mi-mars, Patrick Laffont, maire sans étiquette de Laroque-d’Olmes, bourg ariégeois de 2.500 âmes, a son nom inscrit sur un bénitier de l’église. Une belle vasque en marbre rouge, de forme octogonale, et une plaque sur laquelle figure en lettres dorées cette inscription : « P. Laffont. Maire ».

Pour l’abbé Hervé Savournin, curé de la paroisse, pas de quoi fouetter un diablotin : « Ce n’est pas la première fois qu’on fait ce genre de chose. Roger, l’ancien maire communiste, a eu son nom gravé sur une cloche, c’était moins visible. Là, c’est pour remercier le maire de nous avoir aidés financièrement. »

Lequel le confesse au « Canard » : « J’ai été un peu surpris de voir mon nom gravé, mais ça fait toujours plaisir, même si je ne suis pas catholique. Et puis c’est vrai que la mairie a déboursé 9.000 euros pour l’achat des deux bénitiers.» Sur le second bénitier, le curé a fait graver un nom : le sien.

Don Camillo et Peppone sont de retour !

Ce qui énerve quelque peu Christian Eyschen, vice-président de la Fédération nationale de la libre-pensée : « Certes, les communes sont tenues d’assurer à leurs frais l’entretien et la conservation des églises, à condition qu’elles aient été construites avant la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905. C’est le cas ici, puisque l’église date du XIVe. Mais cela ne peut concerner que les travaux de gros œuvre, et certainement pas la décoration intérieure. C’est donc totalement illégal ! »

Cerise sur le bénitier : les contribuables de Laroque-d’Olmes, commune endettée à hauteur de 2,9 millions d’euros, n’ont pas été informés de ce pieux investissement.

Le maire promet que « ce sera évoqué dans le prochain bulletin d’info municipal ». Vu la fréquence de parution de cette feuille de chou (tous les dix-huit mois environ), le prochain numéro devrait tomber aux alentours de l’été 2020.

Soit après les municipales, Dieu merci !


Article signé de J. C. Paru dans le Canard enchaîné du 03/04/2019


6 réflexions sur “Des bénitiers « estampillés » et attributifs

  1. marie 07/04/2019 / 13h39

    Bonjour
    j’ai bien aimé cette histoire, elle aurait pu s’écrire chez nous pareillement.
    Bon dimanche
    Amitiés
    MTH

  2. jjbey 07/04/2019 / 17h23

    J’aime quand on respecte la Loi de 1905 complètement et les obligations qu’elle emporte qui font de notre pays une République laïque. Le curé n’a pas loupé l’occasion de montrer qu’on peut ne pas la respecter et s’est fait un malin plaisir en gravant le nom de ce maire sur un bénitier payé par les contribuables alors que ce mobilier n’entre aucunement dans les obligations communales. Bien joué, on enfonce les coins que l’on peut…………….

  3. fanfan la rêveuse 08/04/2019 / 7h23

    Chacun voit midi à sa porte, mais ce genre d’acte se veut totalement désintéressé non ? !

    • Libres jugements 08/04/2019 / 12h14

      Un tout petit peu étonné Françoise, par votre commentaire et de la fin de phrase : je cite « ce genre d’actes se veux totalement désintéressé, non ?

      La loi de 1905 que l’on veut dévoyer à tout prix, est très clair : elle concerne tous les bâtiments consacrés à un culte ou à des écoles privées d’obédiences cultuelles, les municipalités sont chargées de maintenir en état, le bâti (les murs) et la toiture.

      Déjà, par différent biais, cette loi est contournée notamment dans les écoles privées ou si le village n’a pas d’école publique, les habitants doivent dans leurs impôts locaux régler les moyens de transport pour que les élèves se rendent au village ou au bourg à côté, soit dans l’école privée, soit l’école publique du lieu.
      Vous avez certainement lu comme moi, la volonté de nos gouvernants de permettre aux associations cultuelles de faire intervenir des subventions territoriales, régionales, d’État… ce qui n’est rien de moins qu’engager le prosélytisme cultuel… avec comme crédo (si je puis dire) la France est chrétienne !

      Certes le fait de d’opposer le nom du donateur de la subvention sur les bénitiers à vrai dire ne regarde que l’affectation financière municipale des habitants du village, et de toute façon ne changera pas la vie de ces ruraux.
      Seule une notion de principe, celle de respecter la loi, toute la loi, me semble une obligation légale si nous ne voulons pas avoir des débordements d’autres cultes en France.

      En toute amitiés
      Michel

      • fanfan la rêveuse 08/04/2019 / 15h43

        Je n’ai pas été assez clair ce matin, je pense, la fatigue du week-end 😉
        Je reviens donc auprès de vous. Très sincèrement je pense que l’école privée doit être financée par les parents qui choisissent cette option et non par l’Etat. Dans notre regroupement, les mairies refusent de payer quoi que ce soit pour les parents qui font le choix d’aller dans le privée (d’ailleurs ceux-ci ne demandent rien) ou de mettre leurs enfants dans un autre regroupement scolaire. C’est donc à ces écoles de s’organiser afin de se subvenir à elles seules.

        Je ne trouve pas juste que le clergé ne mette pas la main à la poche pour l’entretien des lieux de culte. Les frais de maintenance devrait alors être au minimum de moitié pour l’église.

        Ce que je soulignais ici, c’était le manque de modestie du donateur et du prêtre Michel… 😉

        • Libres jugements 08/04/2019 / 19h19

          Merci Françoise pour avoir précisé.
          Cordialement
          Michel

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