Réformes retraites, une apparente équité

1€ cotisé = les mêmes droits à retraites. Oui, mais quels droits ?

Emmanuel Macron a annoncé qu’ 1€ cotisé ouvrirait à chaque salarié.e les mêmes droits.

Derrière cette apparente équité se cachent trois problèmes.

  • D’abord le calcul de la retraite ne se ferait plus sur les meilleures années mais sur l’ensemble de la carrière.
  • Ensuite, les mécanismes de solidarité qui neutralisent les aléas de carrière (chômage, maternité…) pourraient être plafonnés, voire totalement supprimés.
  • Surtout, ce principe d’équité ne nous dit rien sur le contenu de nos droits à retraite. Que représentera le montant de la pension par rapport au salaire de fin carrière ? Quel montant de retraite ? Quel âge de départ ?

Ce sont les questions de base que nous nous posons toutes et tous. Et là-dessus aucune réponse. Et pour cause…

 Un régime par points, à cotisation définies, c’est quoi ?

Le gouvernement nous annonce un régime par points, à cotisations définies. Qu’est-ce que cela signifie ? Que chacun percevra en fonction de ce qu’il aura cotisé durant toute sa carrière, mais que le montant de la pension ne sera pas garanti et ne sera connu seulement qu’au moment du départ en retraite.

Ce qui est bloqué c’est le montant des cotisations, que le gouvernement ne veut pas augmenter. Si elles ne suffisent pas à financer les pensions, les retraites seront revues à la baisse.

Mais compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie, ce montant ne suffira pas : en conséquence, les retraites seront réduites, y compris celles déjà liquidées.

La certitude que nous pouvons donc avoir, c’est que nous serons toutes et tous perdants.


Pour les Ingés, Cadres et Techs : la capitalisation

Le détail de la réforme n’a pas été dévoilé. Mais nous savons d’ores et déjà que 3 facteurs pénaliseront directement les ingés, cadres et tech.

  • Le montant des pensions sera calculé sur l’ensemble de la carrière, sur les 43 annuités cotisées, au lieu des 25 meilleures années dans le privé et des 6 derniers mois dans le public. Ceci pénalisera directement ceux qui ont une progression de carrière.
  • Pour les femmes: la double peine.

Les femmes sont payées en moyenne 26% de moins que les hommes et touchent une pension 40% plus faible. Ces inégalités sont en partie compensées par les droits familiaux, avec la validation des congés maternité et parental et les pensions de réversion en cas de décès du conjoint. Ces droits ont pour objectif de maintenir le niveau de vie, ils sont donc accessibles à toutes les femmes quel que soit leur niveau de salaire, et leur montant est proportionnel au salaire. Le gouvernement veut les remplacer par un filet de sécurité minimum, limité aux femmes dont les carrières sont les plus précaires.

  • L’objectif ? Réorienter les salarié.e.s solvables vers la capitalisation.

La baisse générale programmée des pensions, et celles des Ingés, Cadres et Tech en particulier, vise à généraliser les retraites par capitalisation comme complément de retraites. Cette incitation sera encore plus forte pour les cadres sup qui ne pourront plus cotiser dans le système commun (ni percevoir de pension) au-delà de 9 933€ brut mensuels contre 26 488 € aujourd’hui. Pourtant, les expériences étrangères et la crise financière ont montré à quel point les retraites par capitalisation sont risquées et peuvent s’évaporer en cas d’effondrement boursier.  Ajoutons qu’elles contribuent à la financiarisation de l’économie, détruisent de l’emploi et alimentent la spéculation au détriment de nos entreprises.

  • Qui seront les seuls gagnants de cette réforme ?

  • Les banquiers et les assureurs.


    Merci a Danielle R. pour nous avoir signaler cette info

8 réflexions sur “Réformes retraites, une apparente équité

  1. bernarddominik 26/07/2018 / 17h59

    L’argument des 25 meilleures annèes est absurde, d’autant plus que ce montant est plafonné à la moitié du plafond ss et diminué des trimestres non cotisés, et il a de nombreux effets pervers. La solution de la retraite par points est sans contexte la plus juste, à condition que le taux de rémunération du point soit suffisant. Quant à la solidarité pour ceux qui n’auront pas, ou pas assez cotisé, elle ne doit pas reposer uniquement sur les salariés, comme c’est le cas aujourd’hui. Aujourd’hui les salariés du privé sont la vache à lait du système, selon mon syndicat (je reçois sa lettre trimestrielle) l’arco et l’agirc ont 71 milliards de réserve, auquel s’ajoutent les 36 milliards du fond Jospin (qu’elles ont payé), il semble que Macron lorgne sur cette cagnotte, et c’est surtout ça qui inquiète mon synficat (cftc)

  2. bernarddominik 27/07/2018 / 10h58

    Sur les banquiers, en interne ils reconnaissent que la retraite par capitalisation n’est intéressante que pour le banquier (document interne BNPP diffusé par l’association des retraités de la banque).

  3. Armelle Godefroy 25/08/2018 / 20h00

    Cette réforme « par points » n’est pas très explicite.
    On ne dit pas tout.
    Mais une réforme qui aurait consisté à dire « fini les 25 meilleures années, mais toutes les années pour calculer le salaire annuel moyen », et tout le monde aurait compris que leur retraite aurait été plus faible que dans l’ancien système. Mais c’est en fait exactement la même chose, les coefficients de revalorisation de chaque année pour calculer le salaire annuel moyen auraient été ajustés en fonction des mêmes critères, espérance de vie, etc …
    Ça aurait été beaucoup plus simple (on changeait 25 années par toutes les années, et tous les coefficients de revalorisation en fonction de la situation économique au moment du départ) et çà aurait été tout autant pénalisant.

    • Libres jugements 26/08/2018 / 12h10

      Bonjour Armelle, merci pour votre passage sur ce blog.

      Par contre je ne dois pas être très réveillé, sans aucun doute … mais je n’arrives pas à suivre votre commentaire/démonstration …
      C’est plus mal ou mieux la retraite « à points » et qu’est-ce qui est mieux ou plus mal, la façon de calculer, le temps de référence ?
      Merci d’éclairer ma lanterne un peu vacillante de vieux retraité
      Cordialement
      Michel

      • Armelle Godefroy 30/08/2018 / 10h59

        Bonjour,
        La retraite par « points » est moins bien. Pour faire simple, prenons le cas d’une personne qui a toujours cotisé au plafond de la sécurité sociale pendant 42 ans. Pour cette personne le salaire moyen sur les 25 meilleurs années est sensiblement le même que celui sur les 42 ans (la différence joue sur les coefficients de revalorisation qui dépendent de beaucoup’de paramètres en fonction des années). Elle aura un cetain nombre de points équivalent aux cotisations. La valeur du point sera vraissemblablement au plus égale à la valeur pour laquelle la retraite dans le nouveau système sera au plus égale à la retraite du système actuel. Disons que si la retraite actuelle est de 20000 euros annuels et les cotistions sur 42 ans correspondent à 10000 points, le gouvernement ne va certainement pas mettre la valeur du point à plus de 2 euros.
        En revanche, une personne qui aura cotisé au plafond pendant 25 ans et 17 ans au Smic, et donc disons qu’elle a acquis 7000 points en convertissant ses cotisations, elle a avec le système actuelle 20000 euros de retraite annuelle, alors qu’avec le nouveau système, elle aura au plus 7000*2=14000 euros.
        J’en conclus que la retraite par « points » est pénalisante.
        Avec le nouveau système, il n’y a plus de temps de référence mais toujours un âge légal de départ en retraite (62 ans actuellement) malheureusement insuffisant (il faudra travailler plus longtemps) pour avoir la même retraite qu’actuellement.

        • Libres jugements 30/08/2018 / 14h33

          Merci pour ces précisions.

          Cordialement
          Michel

  4. Armelle Godefroy 31/08/2018 / 14h46

    Bonjour,
    Suite à mon précédent commentaire, je vais à présent donner mon avis sur la retraite complémentaire (ARRCO, AGIRC, IRCANTEC…). Dans le régime actuel et probablement futur, des points sont accumulés tous les ans en fonction des cotisations sur rémunérations. La retraite complémentaire est alors calculée en multipliant ce nombre de points par la valeur du point et par un coefficient de minoration s’il n’y a pas eu assez de trimestres validés. Exemple, Mr X prend sa retraite à 62 ans. Il a 20000 points ARRCO et tous ses trimestres. La valeur du point étant approximativement de 1.25, il a une retraite annuelle de 25000 Euros. Mr Y prend également sa retraite à 62 ans, il a également 20000 points ARRCO mais il lui manque 20 trimestres (pour valider un trimestre actuellement il faut cotiser sur une rénumération de 1482 euros, et donc on peut obtenir 4 trimestres pour des remunérations annuelles supérieures à 5928 euros). Il perçoit donc une retraite complémentaire de 19500 euros du fait de l’application d’un coefficient de minoration de 0.78. Quand sera t-il dans le régime futur pour lequel on ne regardera plus les trimestres cotisés ? N’y aura t-il plus de coefficient de minoration à partir du moment où le départ s’effectuera à partir de l’age légal ? Certainement pas, Mr Y aurait alors une retraite plus importante de 25000 euros, soit 5500 euros de plus qu’actuellement (contraire au but recherché de la réforme où l’on veut à tout prix baisser les retraites). Je pense qu’un coefficient de minoration existera toujours et sera fonction de l’age de départ en retraite (par exemple une variation linéaire de 62 ans,0.78. à. 67 ans, 1.). De cette façon, Mr X sera pénalisé car sa retraite complémentaire passera de 25000 euros à 19500 euros.
    Remarque: l’exemple donné, où Mr X et Y ont le même nombre de points ARRCO mais pas le même nombre de trimestres, est tout à fait plausible. Mr Y aura eu des périodes sans travail et d’autres avec des rémunérations très supérieures à celle de Mr X (dans l’exemple 20000 points est vraissemblablement excessif, mais choisi juste pour simplifier les calculs et rendre mon commentaire compréhensible).

    • Libres jugements 31/08/2018 / 16h35

      Grand merci pour toutes ces précisions.
      Bon WE
      Michel

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