Pour une insurrection des consciences

  • De qui dépend que l’oppression demeure ?
  • De nous.
  • De qui dépend qu’elle cesse ?
  • De nous.

Bertolt Brecht.

L’élection d’Emmanuel Macron à l’Élysée constitue un pas décisif dans la guerre de classe des plus riches contre les peuples. Le jeune banquier venu de la banque Rothschild représente désormais au sommet de l’État la synthèse des intérêts de l’oligarchie faisant fi des alternances entre la droite et la gauche libérale ou entre le public et le privé. Il signe également la fin du régime parlementaire : désormais la loi sera dictée par les lobbyistes industriels, bancaires, financiers, nationaux et internationaux. Ce sont eux qui, par la voie des ordonnances, feront la loi et inscriront dans le droit, la légalité de leurs intérêts privés.

La « pensée unique » balaye toutes les fractures et transforme la violence des riches en une violence invisible, inaudible et indicible qui doit être ressentie comme une « donnée naturelle » allant de soi et donc intouchable. Les dominants parviennent à généraliser et à universaliser leurs valeurs, leurs modes de vie et leurs intérêts économiques et financiers.

Mais cet arbitraire d’un droit conçu par et pour ceux qui cumulent richesses et pouvoirs doit être discret, méconnu, pour exercer son « efficacité symbolique », comme l’écrit Pierre Bourdieu, et obtenir la reconnaissance, voire la complicité des dominés. Si la mystification inaugurale de la loi présentée comme émanant de la volonté du peuple, alors qu’elle reflète avant tout celle des princes, était dévoilée, elle pourrait remettre en cause le respect des lois et le principe même de l’obéissance civique.

La domination des riches s’organise dans l’arbitraire des titres de propriété (usines, valeurs mobilières, médias, biens immobiliers, œuvres d’art…) détenus exclusivement par une seule classe sociale, celle des beaux quartiers.

Pour ceux et celles qui n’ont que leur force de travail manuelle ou intellectuelle à proposer aux propriétaires de tout poil, on peut comprendre que la tâche soit difficile bien qu’ils soient les majoritaires de la terre, ceux qui font fonctionner l’économie réelle. Pourtant ils sont incapables de mettre à bas cette oligarchie aujourd’hui mondialisée dont la prédation menace l’avenir de la planète et de l’humanité. Pourquoi cette incapacité ?

La déréglementation de la vie économique permet l’éclosion d’un cynisme individuel et collectif. C’est en affichant ouvertement son déni de la règle que le dominant prend le pas sur les dominés, eux-mêmes tentés de se replier sur un individualisme de dernier recours en abandonnant les luttes collectives. L’absence d’utopie entraîne l’aliénation de la conscience collective.

C’est à une insurrection des consciences que nous appelons en mobilisant nos travaux de recherche sur la classe dominante. La personnification des positions de pouvoir contribue à la prise de conscience du fait que le capitalisme permet à des êtres humains de voler et d’exploiter d’autres êtres humains. Un cannibalisme à abattre !

Des actions unitaires visant explicitement les prédateurs de haut vol seraient à même de faire vivre cet arbitraire des rapports de classe. Pourquoi ne pas organiser des manifestations dans les beaux quartiers et devant des immeubles symbolisant la spéculation financière et la fraude fiscale ? Renversons la violence symbolique en faisant vivre les riches sur le pied de guerre.


Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, Sociologues, directeurs de recherche au CNRS


 

4 réflexions sur “Pour une insurrection des consciences

  1. bernarddominik 24/04/2018 / 15h50

    Berthold Brecht qui a fini sa vie comme chantre de la RDA avec sa police politique la stasi na parle visiblement pas pour lui même. Celà fait bien longtemps que le président de la république ne représente plus les classes populaires. L’argent est le moteur de la guerre, et celà même avant son invention. La marxisme a fini en eau de boudin et le Warren Buffet peut se targuer que les riches ont vaincu. Dans notre démocratie chacun tire la corde à soi essayant de grignotter quelques privilèges, et c’est fu pain béni pour le pouvoir qui s’est construit sur les corporatismes et les féodalités. A tel point que même l’extrême gauche ne parle pas d’égalité, consciente que Lénine a batti son pouvoir sur l’opposition entre les ouvriers et les autres corps sociaux. Nous sommes tous complices de notre asservissement mais pas pour la même raison: chacun défend ses petits privilèges tout en récusant ceux des autres.

    • Libre jugement 25/04/2018 / 11h53

      Trop facile de limité Brecht a cet argument.
      Celui qui écrivit « La résistible ascension d’Arturo Ui » ne peut-être identifié que comme « chantre » de la STASI. Ce raccourci revient a affirmer que Chaplin était communiste a cause de son film le « Dictateur » – ce qui fut fait en son temps du bon vieux maccarthisme …
      Alors que dire d’un Louis-Ferdinand Céline ce « BRAVE » homme !!!!

      Pour le reste … chacun peut en vouloir a la société, c’est son droit et c’est aussi respecter cette opinion que de mettre a disposition des lecteurs tous les commentaires … A titre personnel tous les commentaires sont des enseignements et permettent une autre lecture d’evenements sociétaux.

  2. tatchou92 24/04/2018 / 16h22

    Chiche !

  3. jjbey 24/04/2018 / 18h37

    Les créateurs de richesses sont plus nombreux que les accapareurs.
    Quand ils prendront conscience de cela ils prendront conscience du fait que l’exploitation ne peut plus durer et il n’y aura nul besoin de violence pour que le système s’écroule et que l’homme cesse enfin d’être un loup pour l’homme.
    Prolétaires de tous pays……

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