L’écrivain Junot Díaz raconte …

Un retentissant article dans le “New Yorker” sur le viol masculin

C’est un texte dont on ne ressort pas indemne, de l’avis de la plupart des médias qui l’ont commenté depuis sa parution lundi 9 avril sur le site du magazine The New Yorker. Dans ce long essai « puissant » (Time), le romancier américain d’origine dominicaine Junot Díaz se confie pour la première fois publiquement sur les viols dont il a été victime, enfant :

« Oui, ça m’est arrivé. J’ai été violé à l’âge de 8 ans. Par un adulte en qui j’avais vraiment confiance. Après m’avoir violé, il m’a dit qu’il fallait que je revienne le lendemain, sinon j’aurais ‘des problèmes’. Et, comme j’étais terrorisé, et perdu, je suis revenu le lendemain, et j’ai été de nouveau violé. »

“Mon viol a défini ce que je suis”

L’auteur de « La Brève et Merveilleuse Vie d’Oscar Wao » (Plon, 2009), pour lequel il a reçu le prix Pulitzer de la fiction, relate en détail les phases de dépression qui ont suivi, les cauchemars à répétition, les tentatives de suicide et le désastre qu’a longtemps constitué sa vie sexuelle et amoureuse, qu’il interprète aujourd’hui comme autant de conséquences du traumatisme subi :

« Ça a foutu en l’air mon enfance. Ça a foutu en l’air mon adolescence. Ça a foutu en l’air toute ma vie. Plus que le fait d’être dominicain, plus que le fait d’être un immigré, plus, même, que le fait d’être d’origine africaine, c’est mon viol qui a défini ce que je suis. J’ai consacré plus d’énergie à le fuir qu’à vivre. Je ne comprenais pas pourquoi je n’avais pas résisté, pourquoi j’avais une érection alors qu’il me violait, je me demandais ce que j’avais fait pour mériter ça. Et j’avais peur, sans cesse – peur que le viol m’ait « détruit » ; peur qu’on me « découvre » ; peur peur peur. Les « vrais » hommes dominicains, on ne les viole pas, après tout. Et si je n’étais pas un « vrai » homme dominicain, je n’étais rien. Le viol m’interdisait la virilité, l’amour, tout. »

Les hommes victimes des codes dominants de la “masculinité”

Pour le site féministe Jezebel, qui rapproche son témoignage du mouvement #MeToo, ce passage précis du texte de Díaz est crucial :

« Cette réalité toute simple qu’il souligne plus haut explique pleinement pourquoi la « masculinité toxique » est plus qu’une expression tellement banale qu’elle en est devenue un cliché. [Elle montre] que les valeurs culturelles dominantes au sujet de la « virilité », consolidées et codifiées grâce au patriarcat, blessent toutes les personnes qu’elles touchent [hommes comme femmes]. »

Connu aux États-Unis pour avoir été l’un des premiers à légitimer l’usage littéraire du “spanglish” (mélange d’anglais et d’espagnol parlé par de nombreux Latino-Américains), l’écrivain raconte comment les viols ont infusé, sans même qu’il en ait conscience, certains de ses personnages et certaines des intrigues de ses livres.

Il explique également « à la fois comment il a été incapable de vivre une vie sexuelle saine en raison de son agression, et comment il a ensuite noyé son traumatisme dans l’infidélité ».

Comme le conclut Jezebel :

« Il a fallu beaucoup de courage à Díaz pour s’exprimer, c’est une main tendue pour les rescapés – et parce qu’il est parvenu à l’écrire d’une façon qui dépeint aussi précisément les ravages émotionnels d’un viol, c’est un présent, voire un baume qu’il nous offre. »

 Dénoncer les différents et trop nombreux cas de viols des femmes, femmes battues et harcèlements des femmes, certaines-certains ont oubliées que malheureusement les mêmes faits existaient aussi parmi les hommes … y compris la cohorte d’actes de pédophilie connus et certainement hélas, de nombreux à découvrir, par de nombreux prêtres de différentes églises …


Courrier international – Paris, Titre original : « Tabou. L’écrivain Junot Díaz raconte le viol masculin dans un retentissant essai du “New Yorker” » –Source


 

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