Les retraités les plus modestes ne devaient pas souffrir de la hausse de la CSG. La réalité est plus cruelle, et l’électorat rue dans les brancards. Pour les députés « En marche ! » revenant de leur circonscription, le constat est unanime et catastrophé : l’augmentation de la CSG décidée par Macron à l’automne dernier, qui touche 60% des retraités, a fait des ravages dans l’électorat…
A tel point que président de la République et Premier ministre y voient l’une des causes des deux défaites essuyées le 4 février aux législatives partielles de Belfort et Pontoise. Voire de la baisse de popularité (près de 10 %) enregistrée par Macron et Philippe dans les sondages depuis la fin de janvier.
De quoi appuyer un peu plus l’image d’un Macron « président des riches » et, surtout, instruire son procès en indifférence aux défavorisés du pouvoir d’achat.
L’Élysée réfléchit bien à une stratégie pour tenter d’effacer les effets négatifs de cette hausse de la CSG. Mais, jusqu’ici, au Château, personne n’a trouvé la martingale.
Tout a commencé par une série de maladresses.
La CSG est relevée, oui, mais uniquement sur les plus grosses retraites, avait d’abord annoncé la com’ gouvernementale. La ligne jaune était fixée à 1.200 euros par mois. Est-ce vraiment un critère de richesse, alors que le seuil de pauvreté est à 1.015 euros et la retraite nette moyenne à 1.300 euros ?
Seconde maladresse, une grossière erreur de timing. Si la baisse des retraites nettes (amputées de la nouvelle CSG) est effective depuis le 1er janvier, la diminution d’autres prélèvements — dont devrait bénéficier la majorité des retraités (1) — n’interviendra qu’à l’automne.
Le contribuable, très saint Thomas, ne croyant que ce qu’il voit, les grommellements se changent en grogne sévère !
Ces balourdises ne suffisaient pas.
Quelques mauvaises surprises sont également apparues… Exemple : l’augmentation de 1,7 point de la CSG (de 6,60 % à 8,30 %) s’applique non à la retraite nette, celle effectivement perçue, mais à la retraite brute — c’est-à-dire y compris les charges sociales… dont la CSG. [En résumé le prélèvement de la CSG est effectué deux fois]
L’augmentation effective par rapport au revenu net sera donc en réalité de 1,83 point. Ainsi, un retraité touchant une pension mensuelle de 1.500 euros net [qui] pouvait s’attendre à payer 25,50 euros de CSG en plus chaque mois (306 euros sur l’année). Erreur, ce sera 27,45 euros par mois en plus. Soit 329,40 euros pour l’année. Et même parfois un peu plus, car le calcul s’applique au « revenu fiscal de référence », c’est-à-dire au revenu imposable, auquel on ajoute certains abattements non imposables. Simplissime !
Pour les retraités n’atteignant pas les 1.200 euros fatidiques mais bénéficiant de la pension de réversion de leur conjoint(e), c’est la double peine. Ainsi, une retraitée percevant 1.000 euros de pension, auxquels s’ajoutent les 500 euros de réversion de son mari décédé, est rattrapée par la hausse. De même pour les retraités touchant un pécule de base inférieur à 1.200 euros mais qui dépassent le plafond avec leur retraite complémentaire.
Le diable résidant dans les détails, de nombreux retraités ne se sont rendu compte de l’importance du siphonage qu’à la réception de leur bulletin de pension. Tel ce lecteur du « Canard », professeur de collège retraité bénéficiant de la pension de réversion de son épouse, qui va perdre 68 euros par mois. Soit 816 euros par an, correspondant à trois semaines de retraite.
Au diable la varice !
La surprise est d’autant plus amère que, sous Hollande, le précédent gouvernement avait aussi assaisonné les retraités. L’accord sur l’assurance-chômage signé le 22 mars 2014 stipulait en effet que les plus de 65 ans — salariés ou retraités reprenant un emploi salarié — devraient désormais régler une cotisation chômage de 2,4 %. Coût de cette augmentation pour une pension moyenne : 375 euros par an.
En raison du caractère baroque de cette assurance qui n’assure rien (les retraités sont rarement au chômage…), le gouvernement l’avait baptisée « contribution spécifique de solidarité ».
La mesure, en tout cas, n’a pas été abrogée par le gouvernement Philippe, lui aussi aux petits soins avec les retraités…
Hervé Martin – Le Canard Enchaîné – Édition du 28 fév. 2018
- « Les taxes, c’est moi ! »
Pas de bol : l’augmentation de la CSG intervient alors que, depuis deux mois, les sondages se succèdent et traduisent la même aspiration : maintenant que le chômage baisse, le pouvoir d’achat devient la priorité… et le gouvernement s’en bat
Il a surtout eu la brillante idée de commencer par les hausses (CSG, fiscalité écologique) et de renvoyer les baisses (taxe d’habitation, totalité des charges sociales) à la fin de l’année.
Circonstance aggravante : la flambée des taxes sur les carburants s’ajoute à celle du prix du pétrole sur les marchés. [C’est sans compter les diverses taxes et augmentations – Edf, Gdf, Sncf, Autoroute, Tabac, Carburant, …]
L’OCDE apporte de l’eau au moulin des mécontents. Dans son dernier rapport sur la France (publié en septembre), elle fixe comme « priorité » la baisse des impôts. Un vrai coup de chance, la diminution des prélèvements obligatoires — 20 milliards sur le quinquennat —, c’est aussi le programme de Macron. Sauf que, depuis son arrivée au pouvoir, ils ont augmenté… Mais, dans quatre ans, c’est sûr, ces mauvais chiffres — ou ces belles promesses? — seront oubliés.