#BalanceTonHosto

Récemment apparu sur Twitter, le #BalanceTonHosto est devenu le nouveau cri de ralliement des soignants, écœurés par les absurdités administratives et économiques qui entravent leurs missions.

Mauvaise organisation, locaux dégradés, conditions de travail difficiles… Depuis le début du mois de janvier, de nombreux témoignages du personnel hospitalier révèlent sur Twitter les dysfonctionnements des CHU français derrière le #BalanceTonHosto.

Absurdités en chaîne 

« J’ai dû tomber sur un truc absurde au travail, et, au lieu de rager dans mon coin, je me suis dit que j’allais en faire profiter Twitter, sur le ton de l’humour », raconte François, médecin hospitalier à l’origine du mouvement, à France Info.

« Le côté provocateur de #balancetonhosto n’est pas complètement anodin, mais je n’étais pas dans l’idée d’une dénonciation. Plus une structure est grosse, plus il y a de dysfonctionnements », explique-t-il.

Le praticien qui anime également une chaîne de vulgarisation médicale sur Youtube, tient néanmoins à distinguer son initiative d’un « hôpital bashing », insistant auprès de nos confrères sur la dimension humoristique du hashtag qui pointe « les incohérences fonctionnelles (…) qui dénotent un manque de bon sens, sans trop impacter le soin. » Et précise, ne pas être « là pour juger la capacité médicale, car il est toujours plus facile de refaire le match après. »

Dégradation des conditions de travail

Dans la lignée d’une tribune parue dans Libération le 15 janvier et signée par 1 000 médecins, l’humour laisse place à l’indignation. A l’appel des professeurs André Grimaldi, Jean-Paul Vernant et de la docteure Anne Gervais, les signataires alertent sur un manque de budget qui « entraîne une dégradation des conditions de travail, provoquant épuisement et démotivation des soignants et en conséquence, une baisse de la qualité des soins.» A leur suite, certains se sont en effet emparés de ce nouveau cri de ralliement pour dénoncer des fautes graves au sein des services hospitaliers. L’occasion d’aborder des sujets sensibles comme les conditions de fin de vie.

Au CHU à 3h du mat, ils ont refusé de laisser rentrer le chirurgien de garde qui venait pour sauver un patient d’une ischémie aiguë de jambe (urgentissime)…pour non paiement de parking.

« Une entreprise qui doit devenir rentable »

La réaction des professionnels de santé que nous avons interrogés à propos du #BalanceTonHosto est, en effet, unanime. Ils y voient l’occasion de dénoncer des conditions de travail éprouvantes où les contraintes financières font loi. « Le problème majeur c’est que les dirigeants pensent économie alors que nous on est là pour prendre soin des gens. Nous n’avons plus le temps de prendre soin d’eux, » s’insurge Margaux, infirmière en EHPAD dans le Sud-Ouest. « Notre conscience professionnelle fait qu’on donne toujours plus sans aucune reconnaissance de la part des responsables et bien souvent avec un salaire de misère comparé à nos responsabilités, » explique-t-elle.

La santé est pensée comme une « entreprise qui doit devenir rentable, » corrobore Manon, infirmière dans un grand hôpital parisien. « On vient, par exemple, d’apprendre que les IDE (Infirmier Diplômé d’Etat) de nuit de l’AP-HP (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris) seront moins payés, par un simple courrier. La nouvelle nous est simplement donnée par la poste. »

Le constat est le même pour Bastien qui revient sur les difficultés auxquelles il s’est heurté lors de ses premiers stages à l’hôpital : « En psychiatrie, quasiment la moitié des médecins psychiatres était arrêtée pour cause de burn out sans être remplacée. Le service a donc été dans l’obligation de supprimer des places d’hospitalisation », se souvient-il.

Rappelons, à cet égard, qu’en novembre dernier le suicide d’un neurochirurgien au CHU de Grenoble avait remis à l’ordre du jour de façon brutale la détresse psychologique de nombreux agents de l’hôpital public.


Léa Casagrande – Les Inrocks – Titre original « #BalanceTonHosto : le cri du cœur du personnel soignant pour dénoncer ses conditions de travail » – Source (lecture libre)


 

6 réflexions sur “#BalanceTonHosto

  1. bernarddominik 28/01/2018 / 11h00

    Quand on a un rendez-vous en consultation à l’hôpital on passe plus de temps pour la paperasse à l’admission qu’en consultation.
    A cela se rajoute le temps d’attente. Et pourtant j’habite une région qui est classée « suréquipée », et c’est vrai que j’ai obtenu un RDV avec un spécialiste dans le délai de seulement 3 semaines, à comparer aux 6 mois de certaines régions.

    Mais, comme informaticien, j’ai trouvé, certes des améliorations sur l’administratif, mais une gestion du dossier médical insuffisante, et qui devrait être centralisée pour éviter de refaire les mêmes analyses.

    On nous dit qu’il y a autant d’administratifs que de soignants dans un hôpital. Je me demande où est ce personnel, car rien que pour la lecture de la carte vitale j’ai attendu 30 minutes, ce pourrait être fait à une borne automatique.
    La carte mutuelle pourrait être normalisée et informatisée.

  2. tatchou92 28/01/2018 / 14h17

    Ça devait se produire !!
    Les hommes et les femmes qui travaillent dans le service de santé, quel que soit leur statut aiment leur travail, je dirais leur sacerdoce (je parle en connaissance de cause pour y avoir travaillé de 1964 à 1981).
    Ils n’en peuvent plus et veulent travailler dans de bonnes conditions pour les patients d’abord, pour eux ensuite.

    Pas étonnée qu’il y ait des suicides, des dépressions, des démissions.
    La santé n’a pas de prix, n’est pas une marchandise…
    Patients et Professionnels = même combat !

    • Libre jugement 28/01/2018 / 16h08

      Bonjour tatchou92

      Content de te trouver sur ce blog … Ce premier travail sur ce blog et son utilisation avant de temps à autres des articles plus conséquent, j’espere.
      Fraternellement.

  3. fanfan la rêveuse 29/01/2018 / 7h59

    Bonjour Michel,
    Cet article reflète parfaitement la réalité, connaissant le problème par mes relations et constatant depuis peu personnellement la forte dégradation.
    Je peux comprendre qu’on demande des efforts à chacun afin de maintenir nos soins, mais de là à faire de l’hôpital une entreprise juteuse….Cela me choque profondément…
    Question, n’y a t’il pas un autre gros souci de gestion de ces soins ailleurs, qu’il faudrai prendre en charge très sérieusement ? Je le pense !
    Bonne journée Michel !
    🙂

    • Libre jugement 29/01/2018 / 10h18

      Françoise bonjour,
      Merci d’être toujours aussi présente à la lecture de ce blog

      Sur l’article:
      Malheureusement je pense qu’il est en deçà de la réalité dans certains services et en fonction de son implantation sur le territoire.
      La situation est désastreuses hors les zones des très grandes agglomérations ou sont implantés le CHU et même là ou ils restent quelques chefs de services très spécialisés, les ARS les obligent a « prendre-s’occuper » d’une autre spécialisation …

      Autre exemple : Ma femme suivie (pourtant dans un des CHU les plus à la pointe de la medecine te des recherches) doit, tous les six mois se rendre a Montpellier pour une maladie « orphelines » (pour le moment sans remèdes) le professeur qui la suit s’est vu privé d’assistant-interne (pas assez de cas rentable – pas de médications connues (surtout pas de recherches pour trop peu de cas en France itou a l’étranger)) n’a plus de lit disponible pour ne serait-ce qu’une hospitalisation temporaire, le temps de combiner les examens nécessaires. Au résultat les divers examens doivent être programmés en x fois avec des aller-retour en VSL de 190 Km (si elle devait se rendre a Lyon 220 km, un temps-trajet plus long et une spécialisation moins poussée). Je pense que le cumul des coûts du principe de plusieurs RV et déplacements remboursés, sont a l’arrivée d’un montant bien supérieur a une hospitalisation de jour. Ces coûts (qui sont je le pense évitables) multipliés par le nombres de patients de ce spécialistes devrait a l’ARS de revoir sa position et permettre a ce professeur de se voir attribuer un interne et au moins 1 lit d’hospitalisation de jour.
      Mais les hôpitaux avec la gestion (déshumanisée) des ARS sont obligés de vivre en comptant les gants, les blouses et faisant supporter des horaires indécents aux personnels qui n’en pouvant plus sont au bord de l’asphyxie mentale et physique.

      • fanfan la rêveuse 30/01/2018 / 7h12

        Je vous rejoins parfaitement dans votre analyse Michel, économies de bout de chandelle, comme disait ma grand-mère !

Les commentaires sont fermés.