Fausse rupture de la politique américaine au Proche-Orient

[Il est fait grand cas – à juste titre- de] la décision désastreuse de Trump de reconnaître la ville sainte comme capitale d’Israël, [pourtant cette décision] ne doit pas faire oublier le soutien indéfectible de Washington à Tel Aviv, et les renoncements coupables des Etats-Unis dans le dossier israélo-palestinien ces dix dernières années.

En reconnaissant Jérusalem (« Al Qods » en arabe) comme capitale d’Israël, […] Donald Trump a bel et bien foulé au pied le droit international, comme l’a justement remarqué Amnesty.

  • Est-ce, pour autant, une rupture dans la politique américaine au Proche-Orient, comme tant d’observateurs se sont empressés de le dire ?

Un examen attentif de cette politique suffit à démontrer que les dix années qui ont précédé l’élection de Trump ont au contraire préparé la décision de la nouvelle administration. […]

[Une idée développée depuis 24 heures, sous-entend] que les Etats-Unis, auraient désormais quitté leur position de neutralité. En réalité, ils n’ont jamais été neutres, et c’est bien là tout le problème. […]

Les Etats-Unis ont toujours soutenu Israël

Les offensives successives de l’armée israélienne (2008/2009, 2012, 2014) et le blocus de Gaza par Tel Aviv suffisent à démontrer la nature du rapport de force. Un engagement des Etats-Unis, qui financent directement Israël et son armée, permettraient d’apporter un peu d’équilibre à cette négociation asymétrique. Bien au contraire, les Etats-Unis penchent de tout leur poids en faveur d’Israël. Depuis quarante ans, le veto de Washington est intervenu de manière quasi systématique dès qu’il s’agissait de faire condamner à l’ONU la politique de fait accompli menée par Israël, qui expulse de plus en plus de Palestiniens de Jérusalem, et occupe une part toujours plus grande de la Cisjordanie. En réalité, les Américains voient en Israël le seul Etat stable au Proche-Orient, et misent avant tout sur lui pour préserver leurs intérêts régionaux. […]

Dès son annonce, la décision dramatique de Donald Trump a entraîné une nouvelle série de manifestations, durement réprimées par les autorités israéliennes.

[…] … quel choix les Palestiniens ont-ils d’autre désormais, que celui de se révolter ou de baisser la tête ? Quels leviers leurs restent-il pour espérer faire respecter leur droit à un Etat, à la citoyenneté ? En annihilant tout espoir de paix à moyen terme, l’inconséquence de Trump et la politique américaine de petits pieds pratiqués dans le passé par Obama risquent, une nouvelle fois, de peser sur le sort de bien des vies humaines.


Pierre Puchot – Les Inrocks – Source (Extrait)