Pourquoi “Elle” met-il en couve Eric Cantona nu et Rachida Brakni habillée?

Le miroir inversé

Ce n’est pas tant la plastique musculeuse d’Eric Cantona qui interpelle en couve de Elle, que la relation en forme de miroir inversé qu’elle entretient avec le corps habillé de l’actrice Rachida Brakni. Couv de Elle Cantona Brakni

En masquant le corps féminin pour mettre en lumière le nu masculin, ce manteau rouge digne du pire rayonnage de Kiabi bouleverse les conventions. Le regard face à l’objectif et la position protectrice de Brakni envers son époux à l’air timide achèvent d’apporter la réponse à la question posée en couve : en 2015, le couple ne se résume plus à un rapport d’homme dominant à une femme dominée (et dénudée).

A l’intérieur du dossier, Cantona et Brakni clament être féministes, et posent selon le même mode : elle habillée, lui dévêtu. Chaud.

La belle et la bête

Loin d’être agressive, la nudité de Cantona renvoie un message de vérité et de sensualité : c’est parce qu’il repose sur un pied d’égalité et n’hésite pas à dévoiler ses faiblesses que ce couple fonctionne. Pourtant, l’exposition de ce corps relègue aussi l’ex-footballeur à son statut de sex-symbol viril, tandis que le manteau de Brakni tend à la présenter comme la tête pensante du duo. Dès lors, ne retomberait-on pas dans une représentation simpliste pour ne pas dire lourdaude du masculin et du féminin ?

La vérité toute nue

En 2015, le corps s’expose sous toutes les coutures, comme s’il portait dans sa chair la définition du couple comme entité sexuelle. Tandis que Facebook et Instagram versent dans le conservatisme en censurant le moindre téton, la pop-star Miley Cyrus annonce une date entièrement nue devant un public convié à en faire de même. Une façon de combler un manque de reconnaissance médiatique ? Une prise de position politique ? Ou une invitation au questionnement métaphysique ? Débarrassé de ses artifices, à la fois sexuel et terriblement vulnérable, le corps nu semble adresser un “fuck” aux repères sociétaux et pose une terrible question : qui suis-je ?

Carole BoinetLes Inrocks – Source