Un gros nuage noir dans le ciel bleu azur.

C’est lundi 24 août 2015 vers 9h30 que le téléphone a sonné.

Bizarre cet instrument, qui apporte via sa sonnerie joyeuse souvent, bonnes ou mauvaises nouvelles ? Une ancienne publicité disait de lui « qu’il rapprochait les hommes, les familles, aidait ceux dans la solitude, etc. ».

Ciel bleu dès l’aube, la matinée s’annonçait à l’identique depuis plusieurs semaines, déjà chaude à cette heure et prometteuse de « cagna » dans l’après-midi.

Les Ardéchois sont habitués à ces chaleurs en cette saison qui, dans d’autres départements se révèlent exceptionnelles, catastrophiques pour la santé, l’agriculture, la population, la planète. Dans notre département, il n’y a rien d’inhabituel à voir les pelouses roussies par le soleil, les volets fermés à l’heure de la sieste.

La journée se présentait sereine, ma femme et moi vaquions à nos occupations matinales lorsque le téléphone a sonné. Triste information.

La perte d’un ami…

La perte d’un ami est toujours difficile à admettre.

Nous nous connaissions depuis 1970.

Sur les choses de la vie nous avions la même approche, les mêmes réflexions, et souvent les mêmes solutions. Il n’était pas important de se téléphoner quotidiennement pour se comprendre, pour résoudre nos questionnements.

Que de gués nous avons passé ensemble.

Que de passerelles nous avons jeté.

Des vicissitudes de la vie nous avons tous les deux eu notre lot.

La maladie pour toi, hélas pour laquelle tu ne fus pas gâté mais que toujours tu as vaincu jusqu’à ce dernier jour où trop fut trop.

Chacun nous eûmes divers problèmes liés à la vie quotidienne, emploi, famille mais chacun épaulant l’autre, aidait à trouver des solutions.

La retraite ne nous apportera pas plus de quiétude.

De toutes ces années passées ensemble, je retiens les moments de joie, les soirées à Boissy St Léger, au Châtelet, et lorsque tous deux, vous étiez venus nous voir dans notre retraite plusieurs jours, en Ardèche. Je n’en oublie pas pour autant les jours sombres que nous avons chacun de notre côté traversés trop souvent provenant de nos proches ou au travers de problème de santé.

C’est dans ce pays où la lumière est vive, le soleil chaud, que lundi matin, à cause d’un appel téléphonique, nous avons vu passer le plus sombre des nuages.

Vendredi j’ai fait le saut province-Paris-province, pour t’accompagner une dernière fois.

Dans cette église de Boissy, le prêtre, visiblement venu d’une contrée chaude et lointaine, officia pour une bénédiction, roulant des r, écorchant des mots ou des noms. Ce prêtre que tu aurais, te connaissant, gentiment parodié une fois la cérémonie terminée et la douleur du deuil passée.

Il fallait bien toute cette longue amitié pour que moi, l’athée, j’assiste à une bénédiction. Quant aux symboles attachés à ce cérémonial, tu l’auras compris l’ami, je n’ai pas été participant. Je sais que tu ne m’en veux pas sur ce point nous nous étions d’avance, pardonné cette divergence.

La rue qui t’emmena au cimetière vit passée à pied une petite troupe dispersée qui telle les clichés anciens, vue tes proches, fille et petits enfants marchant derrière le cercueil plongé dans le silence de leur deuil, quand dans les rangs suivants, fonction de la distance, les échanges de paroles étaient de plus en plus animés.

Voilà, la pierre tombale remise en place, la cérémonie est terminée.

Reste qu’il n’est pas drôle de soliloquer et que nous n’irons plus déjeuner ensemble au « Courte-paille » où tu allais souvent avec ta femme depuis sept ans disparue. Sauf que les souvenirs seront encore plus vifs lorsque je verrai cette enseigne ou que je passerais non loin de Boissy St Léger.

Adieu l’ami, tu me manques.

MC