Depuis la victoire de Syriza en Grèce le 25 janvier, et a fortiori à travers la dernière séquence politique des négociations dans la zone euro, a mis en lumière la violence avec laquelle les dirigeants de l’Eurogroupe, Merkel en tête, au service de la finance, s’appuyant sur l’extrême droite et bénéficiant du silence complice des autres, a piétiner la démocratie et punir un peuple, qui a osé dire non à l’austérité.
Dans une Europe dominée par le consensus libéral entre forces de droite et sociale-démocrates, dès le 25 janvier, jour de leur victoire électorale, le gouvernement Tsipras et Syriza sont devenus les ennemis de tous, l’expérience alternative à détruire.
25 janvier – 25 juin
5 mois de luttes pour la sortie de l’austérité
Le 20 février, après de difficiles négociations, la Grèce signe l’accord-pont avec l’Eurogroupe. Objectif : allonger le programme de financement précédent le temps de prendre les mesures urgentes et préparer un programme de financement durable à négocier en juin. Loi humanitaire, réintégration de fonctionnaires, réouverture ERT, droit du sol, lutte contre la corruption et commission vérité sur la dette : le gouvernement Tsipras inscrit sa politique à gauche. Pendant ce temps, les termes de l’accord ne sont pas respectés par les créanciers et aucun financement n’est versé. La BCE commence à multiplier les conditionnalités pour l’accès à ses financements : l’asphyxie financière a commencé dès la victoire de Syriza.
La tentative de coup d’État financier, le référendum
Le mandat donné par le peuple grec « Sortir de l’austérité, rester dans l’euro » a conduit le gouvernement Tsipras a une démarche de négociations depuis son élection. Depuis, ni le mandat, ni la démarche n’ont changé jusqu’ici. Le 25 juin, alors qu’un accord était « à portée de main », le FMI rompt les négociations du plan de financement durable en faisant une contre-proposition inacceptable. Tsipras décide alors de convoquer un referendum et appelle à voter NON à la proposition des créanciers. La réponse des forces néolibérales est celle de la pression politique et financière – une stratégie de la déstabilisation et de la peur – pour peser sur le referendum.
Quelques jours avant, Samaras (leader de l’opposition grecque) appelait à un gouvernement d’Union nationale et le Président de To Potami (un parti fondé par les anciens du Pasok et pro-austérité) était reçu en grandes pompes dans toutes les institutions européennes. L’Eurogroupe du 27 juin décide, sans le ministre grec des finances, Yanis Varoufakis, de terminer au 30 juin le programme financier en cours. Le lendemain, conséquence logique, la BCE annonçait la coupure des liquidités pour les banques grecques à la même date. Ce chantage financier a contraint le gouvernement grec à mettre en place une procédure de contrôle des capitaux et à fermer les banques, puis à faire défaut au remboursement du FMI. L’offensive médiatique et politique est coordonnée autour d’au moins deux axes : Tsipras est irresponsable, c’est lui qui a fait échouer les négociations / la question du referendum est pour ou contre la sortie de l’Euro. Le 5 juillet, le NON l’emporte avec 61 %. Tsipras est renforcé et compte toujours négocier. Il s’appuie sur le referendum pour inclure dans les négociations un rééchelonnement de la dette et un plan d’investissement pour la croissance issu du plan Juncker. Son objectif est un programme de financement durable pour stabiliser la Grèce et relancer l’économie.
LE 13 JUILLET, UN TOURNANT HISTORIQUE
Une méthode de « gangsters »
Le Grexit était l’option choisie par Angela Merkel et les droites dures d’Europe (ex : le gouvernement Finlandais de droite/extrême droite) dès le début et jusqu’au dernier moment. Le but déclaré des dirigeants allemands était la « suspension provisoire « , autrement dit l’expulsion de la Grèce de la zone euro, quitte à ouvrir, pour ce pays au bord de la banqueroute, une ère cauchemardesque, et d’entraîner l’Europe elle-même dans une aventure très périlleuse. Quant à la dette grecque, les dirigeants allemands ne voulaient plus en entendre parler. Ils n’entendaient pas davantage consentir de nouveaux prêts à un Etat dirigé par un gouvernement qui a osé le défier jusqu’à organiser un référendum au verdict humiliant pour ceux qui se voient comme les maîtres de l’Europe. La Banque centrale européenne devait continuer à servir d’instrument pour ce coup d’Etat financier. Tout au long du week-end ce « bloc des durs », n’a cessé de faire des propositions provocatrices, humiliantes et inacceptables pour le gouvernement Tsipras, cherchant à ce qu’il quitte la table des négociations.
Un mauvais accord signé « le couteau sous la gorge »
Les mesures imposées dans ce contexte à Athènes sont socialement inhumaines, économiquement contre-productives et politiquement scandaleuses -incluant des violations extrêmement graves de la souveraineté du pays. Le paroxysme est, à cet égard, atteint avec la création d’un « fonds pour les privatisations » : visant à gager des actifs publics d’un montant démentiel -plus d’un quart du Produit Intérieur Brut de la Grèce !- et soustrait à la maîtrise du gouvernement pour la gestion des recettes attendues. Une mesure scélérate s’il en est. Le Grexit n’est pas écarté. Il reste le choix du gouvernement allemand et l’accord ne comporte aucune garantie de déblocage des financements, au contraire, il impose de nouvelles conditionnalités.
Le choix politique d’Alexis Tsipras
Signer un mauvais accord pour éviter le désastre, stopper l’asphyxie financière du pays et la mort à petit feu, empêcher le grexit et la mort subite. Il a favorisé la survie financière du pays. Il a pris ses responsabilités de Premier ministre face aux exigences extravagantes des créanciers, à la possibilité d’un effondrement immédiat du système bancaire et la sortie de l’euro et la « sortie ordonnée » de l’euro préconisée par Schaüble, et même par certains à gauche. La Grèce n’est pas sortie de l’euro, conformément au souhait de 75 % de la population. Donc, pour l’instant, l’objectif de Schaüble n’est pas atteint. Le gouvernement Tsipras est toujours en place et bénéficie d’un très large soutien dans la population grecque. Le deuxième objectif de Schaüble n’est donc pas atteint. Le texte de l’accord a été adopté au Parlement grec dans la nuit de mercredi à jeudi. Dans le groupe de Syriza, la majorité a voté pour, 32 contre dont des personnalités « phares » (Konstantopoulou, Varoufakis), 6 abstentions et une absence. Le CC de Syriza appelait à voter contre. Nous devons être très vigilants à ne pas nous immiscer dans les débats internes de Syriza.
Conclusion :
Il est maintenant évident que l’Europe ne peut continuer ainsi. Une lutte s’ouvre au grand jour entre les tenants de l’ultralibéralisme, prêts à pousser encore et toujours la mise à genoux des peuples pour servir les intérêts de la bourgeoisie, les forces d’extrême droite qui cherchent à tirer profit de la crise pour rendre crédible leur projet nationaliste et xénophobe, et une troisième option, la nôtre, celle de la refondation de l’Europe pour une coopération régionale, solidaire et démocratique. L’aiguisement des contradictions sème une confusion et parfois du désarroi. Cela doit nous conduire, à moyen terme, à des approfondissements et des clarifications. Ce combat ne peut être abandonné devant l’ampleur de la tâche.
- La politique européenne de la France pourrait être différente
Si le Président de la République avait joué son rôle dès le début de l’affrontement entre les « institutions » et le gouvernement grec -à plus forte raison s’il avait tenu sa promesse d’agir pour « réorienter l’Europe » dès son élection en 2012- le rapport de force aurait été bien différent dans le moment crucial que nous vivons aujourd’hui. La France a joué un rôle pour empêcher le grexit. Mais il a laissé Merkel dicter la liste des cruautés et des humiliations qui caractérisent le contenu de l’accord. Alors que son action a prouvé qu’elle pesait lourd dans les processus de négociation, elle a joué les rabatteurs sur les propositions des droites dures et des créanciers.
Extraits de textes d’origines diverses.