«Aucune stratégie de répartition des richesses n’a été mise en place: ni augmentation des crédits à l’agriculture, ni distribution des terres arables, ni apport de revenus de complément aux familles.
Fournir des ressources supplémentaires aux personnes les plus pauvres […] permet pourtant une diminution massive du dénuement »
Roft Traeger économiste à la commission des Nations Unies pour le commerce et développement.
Depuis 2000, les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) ont exprimé la volonté des États membres des Nations unies d’agir sur les conditions de vie dans les pays du Sud: diviser de moitié le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté, éliminer la faim dans le monde, scolariser tous les enfants en âge d’aller en primaire, favoriser l’égalité homme-femme, améliorer les conditions sanitaires (santé maternelle, mortalité infantile, eau potable et réseau d’assainissement) et lutter contre le sida et le paludisme.
LE DÉNUEMENT RESTE DE MISE
Dans tous ces domaines, des progrès importants ont été accomplis ces quinze dernières années. Mais ils se sont surtout concentrés dans les pays émergents, comme la Chine ou l’Inde.
À l’inverse, la plupart des 48 pays les plus pauvres du monde, appelés « pays les moins avancés » par les Nations unies, n’ont pas atteint les Objectifs du millénaire.
Dans ce groupe, un seul État a rempli tous ses engagements : la République démocratique populaire lao (Laos). Les autres pays asiatiques de cette catégorie ne les ont atteint que partiellement.
En Afrique, aucun pays n’est dans la situation du Laos. Seuls l’Éthiopie, le Malawi, le Rwanda et l’Ouganda ont répondu à la plupart des critères.
Résultat: le dénuement reste très répandu dans des pays comme le Burundi, la République démocratique du Congo, le Liberia ou Madagascar, où 75% à 85% des habitants ne peuvent toujours pas subvenir à leurs besoins les plus élémentaires.
Ce rendez-vous manqué s’explique facilement. D’abord, tous les pays du Sud ne partaient pas avec les mêmes difficultés. Réduire l’extrême pauvreté en Zambie en 2000, où 80% de la population était indigente, demandait plus de ressources et plus de temps que dans un pays émergent comme le Maroc, où l’extrême pauvreté était quatre fois moins importante. Ce type d’écart se retrouve d’autant plus facilement au terme du processus lancé par les Nations unies que le soutien des pays riches a fait défaut.
Ces derniers ont plafonné l’aide publique au développement qu’ils donnent, chaque année, aux pays pauvres à 0,35% de leurs richesses. C’est un niveau largement’ insuffisant qui est, en outre, deux fois inférieur au montant que les États donateurs s’étaient engagés à acquitter.
Les pays riches auraient aussi pu accorder une remise de dettes aux pays pauvres. Ils ne l’ont pas fait et l’argent qui sert à régler les créanciers des pays du Nord continue de faire défaut au développement de la scolarisation ou à l’extension; des réseaux d’assainissement d’eau.
LES GAINS DE LA CROISSANCE ONT ÉTÉ MAL RÉPARTIS
Pour autant, les pays pauvres sont les principaux responsables de leur impossibilité à améliorer les conditions de vie. Ils ont bénéficié d’une croissance sans précédent, plus de 7% par an entre 2002 et 2008, mais les gains se sont concentrés dans très peu de mains.
Aucune stratégie de répartition des richesses n’a été mise en place: ni augmentation des crédits à l’agriculture, ni distribution des terres ambles, ni apport de revenus de complément aux familles.
Fournir des ressources supplémentaires aux personnes les plus pauvres, qui constituent la grande majorité dans les pays les moins avancés, permet pourtant une diminution massive du dénuement
À mesure que la proportion de la population qui participe à l’économie s’accroît, l’activité devient plus solide et génère des recettes fiscales croissantes. Celles-ci peuvent être consacrées au développement social. C’est ce processus, décrit ici schématiquement, qui a été entravé par le fonctionnement très inégalitaire des pays les plus pauvres.
Revue Convergence du SPF N°343