Le géant américain a annoncé le 26 mai qu’il paierait des impôts là où il génère des bénéfices. Une déclaration d’intention plus que de revenus.
Le sujet
Pour un plan com, on peut dire que c’est réussi :Amazon rentre dans le rang et va payer ses impôts en France », « Amazon va payer [volontairement) des impôts en France. » Et cætera. La presse unanime (ou presque) l’affirme : le géant de la vente en ligne va, enfin, se mettre en règle vis-à-vis du Trésor public.
Dans une déclaration transmise à l’AFP le 26 mai, l’entreprise américaine annonçait qu’elle allait désormais payer ses impôts là où elle génère des bénéfices. Amazon profitait jusqu’ici de la fiscalité du Luxembourg, où son siège social européen est implanté, afin d’échapper aux régimes fiscaux des Etats membres de l’UE.
Le souci
Tous les pays européens ne sont pas logés à la même enseigne. Si l’Italie, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Espagne vont effectivement voir le mastodonte de l »E-commerce se plier à leur fiscalité, pour la France, –Amazon y travaille, mais ne fixe pas d’échéance », a précisé son porte-parole.
L’entreprise doit d’abord ouvrir une filiale dans l’Hexagone pour se déclarer auprès du fisc. On peut donc attendre longtemps. Par ailleurs, Amazon est passé maître dans l’art de minimiser ses bénéfices.
Le gouvernement reste discret sur la question, mais le libraire en ligne reconnaissait il y a deux ans être visé par un redressement fiscal de l’ordre de 250 millions de dollars pour la seule période de 2006 à 2010.
Le symptôme
Même si Amazon se défend d’agir sous la pression, ces déclarations font indéniablement suite au scandale du LuxLeaks qui révélait, l’hiver dernier, l’optimisation fiscale pratiquée par des multinationales implantées dans le Grand-Duché.
Depuis, Fleur Pellerin, la ministre de la Culture, a relancé -en février [2015]– son projet de «taxe sur la bande passante » contre les Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon) et la Commission européenne a déclaré qu’elle poursuivait son enquête sur les pratiques fiscales d’Amazon ; mais tout reste à faire.
Tandis que l’économiste Thomas Piketty estime sur France Inter qu’il faut « réclamer la note sur les années passées » et mettre en place un « impôt commun sur les sociétés » en Europe, le gouvernement semble considérer les déclarations du géant de l’E-commerce comme solde de tout compte.
Quid enfin des millions d’euros de subventions dont avait bénéficié Amazon lors de l’ouverture d’un troisième entrepôt en Saône-et-Loire en 2012?
La Rue de Valois et Bercy se gardent bien de revenir sur cet épisode fâcheux…
Yann Perreau, Les Inrocks N°1022