On peut avoir historiquement raison et politiquement tort. François Hollande l’a montré dimanche sur Canal + avec son allusion à une Marine Le Pen qui parlerait aujourd’hui comme dans les tracts du PCF « des années 70 » lorsqu’elle fait de la nationalisation des grandes entreprises et la fermeture des frontières les leviers patriotiques du redressement économique. De fait, à bien des égards, cette vision de l’économie, étatiste et anti-européenne, présente des analogies avec celle du PCF de Georges Marchais, mais la comparaison s’arrête là où un fossé sépare ce parti arcbouté sur les acquis sociaux et voulant faire payer les riches, d’un FN qui prend prioritairement pour cibles les immigrés et les « assistés ».
Le président de la République s’est d’ailleurs empressé de souligner cette divergence fondamentale entre le PCF inscrit dans l’histoire de la gauche et une formation qui poursuit sous d’autres formes les vieux combats de l’extrême droite.
Mais en politique, l’oreille est souvent sélective. François Hollande aurait dû être suffisamment averti des dangers de la communication télévisée pour éviter de se risquer sur un terrain aussi glissant. Après tout, des esprits mal intentionnés pourraient avancer qu’en défendant la retraite à 60 ans, Marine Le Pen parle comme dans les tracts du PS des années 2000…
Les communistes, Pierre Laurent en tête, l’ont ainsi pris très mal s’offusquant d’un raccourci semblant les mettre dans le même sac que le FN. Ils auraient pu pourtant, se satisfaire de la suite du propos de François Hollande leur donnant acte d’une attitude irréprochable vis-à-vis des immigrés, ce qui soit dit en passant mériterait quelques bémols quand l’on se souvient de la politique du « bulldozer » de certaines municipalités communistes « des années 70 » repoussant de leurs communes des foyers de travailleurs étrangers.
D’où l’exigence « d’excuses publiques » lancée au président de la République qu’ils risquent d’attendre longtemps mais dont le ton virulent trahit un malaise profond, celui d’un PCF qui s’est fait déposséder par le FN d’un vote protestataire et « antisystème » qui a longtemps été le sien dans les classes populaires. Un malaise dont François Hollande aurait tort de raviver les plaies, alors même qu’il vient de déplorer une désunion de la gauche à l’origine de son élimination fréquente au second tour des élections départementales, et demain peut-être de la présidentielle.
Souligner que le FN emprunte au vocabulaire traditionnel du PCF est un argument dont il est à craindre, pour François Hollande, qu’il soit moins utile dans son camp, qu’efficace pour faire revenir à l’UMP ses électeurs égarés au FN.
Helvig Jean Michel, La République des Pyrénées – Source