Qui osera s’opposer à Vladimir ?

Je ne suis ni pro-russe, ni russe, pas plus sympathisant, ni admirateur de ce pays, exigeant simplement que la democratie s’exerce dans le monde, je me borne à constater et de trouver troublant que le dirigeant de la Russie se retrouve libre de mouvements et que s’« efface » d’une façon ou d’une autre toutes les personnes qui pourraient le gêner dans la gestion personnelle de ce grand pays aux ressources multiples.

Ils s’appelaient : Yuri Shchekochikin (2003), Anna Politkovskaïa (2006), Stanislav Markelov (2009), Anastasia Babourova (2009), Natalia Estimirova (2009), une liste hélas non exhaustive de politiciens, journalistes et militants des droits de l’homme assassinés dans la Russie de Vladimir Poutine. Depuis hier il faut ajouter le nom de Boris Nemtsov, qui a été abattu près du Kremlin vendredi soir. Rarement, sinon jamais, un de leur assassin n’a été traduit en justice. MC


 

Un des plus importants opposants russe à Vladimir Poutine, Boris Nemtsov, 55 ans, opposé notamment à la guerre en Ukraine,  a été tué de plusieurs balles dans la nuit du 27 au 28 février en plein centre de Moscou.

Le président Vladimir Poutine a estimé, par la voix de son porte-parole que « cet assassinat brutal portait les marques d’un meurtre commandité et avait tout d’une provocation » et a promis que la lumière serait faite sur les circonstances de cette mort.

Sceptique, le Financial Times déplore de voir s’ajouter un nouveau nom à la « liste triste et honteuse de politiciens, journalistes et activistes assassinés dans la Russie de Vladimir Poutine […] Leurs assassins sont rarement amenés devant la justice – voire jamais. » Le journal britannique, qui avait justement interviewé Boris Nemtsov cette semaine, rend hommage à un « défenseur acharné des valeurs démocratiques et des droits de l’homme ». 

Soutenir l’opposition

« Parce qu’il dénonçait la corruption de l’État et l’implication du Kremlin dans la guerre en Ukraine, Nemtsov était traité de traître à la télévision nationale et vilipendé sur les réseaux sociaux. Il était régulièrement en première ligne dans les manifestations, et se faisait arrêter ou molester, tout aussi régulièrement ».

Boris Nemtsov devait participer dimanche à une manifestation de l’opposition contre la guerre en Ukraine. Un responsable de la manifestation a annoncé que celle-ci était annulée et remplacée par une marche à la mémoire de l’opposant assassiné.

« En ces temps de tensions autour de la situation en Ukraine, il est tentant pour l’Occident d’isoler la Russie et de se laver les mains de ce qui peut s’y passer, avertit le Financial Times. Mais ce serait faire un grand tort à la vie et à l’œuvre de Nemtsov, ainsi qu’aux militants pro-démocratie qui demeurent en Russie. […] Tout en sanctionnant son régime, l’Occident ne devrait jamais cesser de soutenir -à chaque fois qu’il le peut- le peuple russe ».

Et si…

L’agence américaine Bloomberg publie de son côté une tribune de Leonid Berschisky, qui a notamment fondé le journal financier russe Vedomosti et vit aujourd’hui à Berlin. Il se souvient bien de Boris Nemtsov, pour l’avoir rencontré en 1992 : dynamique, intelligent, populaire, Nemtsov était devenu le poulain du président Boris Eltsine, qui en avait fait son vice-Pemier ministre. « Mais son enthousiasme a faibli et c’est finalement Poutine que Elstine a choisi, en 1999 », raconte Leonid Berschisky. « Je ne peux pas m’empêcher de me demander ce que serait devenu mon pays si Eltsine avait fait un autre choix. […] Sous la présidence de Boris Nemtsov, la Russie aurait pu être un pays où j’aurais pu continuer à vivre et à travailler. Mais il est mort et, avec lui, cette perspective meurt aussi. »

Courrier international Permalien