Associations, chevilles ouvrières des politiques culturelles, crient aux secours…
Longtemps, la France s’est enorgueillie de son dynamisme culturel, porté par une myriade d’associations, œuvrant sur tout le territoire, qui diffusent des spectacles, proposent des ateliers de pratiques artistiques, ouvrent des lieux de créations et d’expressions citoyennes.
Ce discours officiel n’est plus trop porteur ces temps-ci.
Ces 266.500 structures (20 % du total des associations en France et 10 % de l’emploi associatif) sont d’autant plus en premières lignes face à la diminution des financements publics que les subventions comptent pour 85 % de l’argent public qu’elles reçoivent chaque année.
Pour résister, il faut entrer dans la logique des appels d’offres, se regrouper ou tailler dans les effectifs. La preuve par le terrain.
Dans le Gard, l’association « les Elvis platinés » accueille et diffuse, annuellement, plus de cinquante propositions artistiques. En été, elle organise un festival de concerts et d’arts de la rue. Elle mobilise, chaque année, pas moins de 250 bénévoles et réunit près de 12.000 spectateurs, sur un secteur de 30.000 habitants. 45 % de son budget provient de financements publics.
Le reste de ses ressources est généré par les recettes en billetterie et buvette. Depuis trois ans, face au désengagement de l’État, « les Elvis » se tournent vers le mécénat privé. « Je passe 80 % de mon temps à chercher de nouveaux financements, explique Sébastien Toureille, coordinateur de l’association. Le travail de direction artistique se réduit et mon activité ne consiste plus qu’à monter des dossiers et les défendre. »
Labellisée, jusqu’en 2010, par la direction régionale des affaires culturelles, l’association a vu ses dotations publiques amputées d’environ 20 000 euros en six ans. « Je suis, depuis toujours, un militant de la culture en milieu rural, continue Sébastien. Je connais ce secteur d’activités. Aujourd’hui, je suis incapable de me projeter sur deux ans… »
Dans la même région, Frédéric Mary coordonne les activités de la radio associative Escapades. « 80 % de notre budget provient de l’argent public, annonce-t-il. La radio doit servir à diffuser de l’information et permettre aux citoyens de s’exprimer. Mais, dans la situation économique actuelle, difficile de ne pas se faire happer par une logique de « radio-outil », plus rémunératrice. »
En clair, les subventions de fonctionnement baissent et l’association équilibre son budget en facturant des prestations. « L’aspect positif, c’est qu’on est obligé d’innover, mais c’est de plus en plus difficile de mener nos propres projets de création », conclut Frédéric.
Au niveau national, l’association Artfactories/ Autre(s) pARTs réunit des directeurs de lieux culturels, des artistes et des chercheurs. Parmi eux, Philippe Foulquier, de la Friche belle de mai, à Marseille, ou encore, Fazette Bordage de Mains d’œuvres, à Saint-Ouen.
Le ministère de la Culture s’est fortement appuyé sur elle notamment lors de la mise en place, en 2001, de la mission Nouveaux Territoires de l’art. 90 % de ses ressources proviennent de subventions publiques.
En cinq ans, ses dotations ont été réduites de 75 %. Portant un regard sur l’ensemble des lieux et festivals qu’animent, sur tout le territoire, les membres de l’association, Bahija Kibou, coordinatrice, cache mal son désarroi. « Le fauchage est généralisé, alarme-t-elle. Ça n’a jamais été aussi intense et sec. Tous les réseaux, toutes les structures sont fragilisés. » La culture a toujours été une valeur de la gauche. Sur le terrain associatif, comme sur celui de l’intermittence, gouverne-t-elle encore?
Emilien Urbach
Billet d’humeur.
Alors que de moins en moins de temps est consacré à la culture faute de moyens et de personnes compétentes pour l’enseigner dans les écoles et lycées, alors que l’austérité gagne du terrain en diminuant les dotations aux municipalités les obligeants à ne provisionner que les projets structurants absolument nécessaires, alors que le pouvoir d’achat est en baisse constante dans tous les ménages, les associations trouvant de moins en moins d’adhérents solvables et de subventions pour équilibrer leurs comptes, disparaissent.
Il est temps de se poser la question : les grands de ce monde, penseurs avant tout au travers du prisme de leurs intérêts, ne trouvent-ils pas leur compte avec beaucoup de machiavélisme dans la perte de connaissance culturelle.
MC