Hollande-Sarkozy, même pari pour 2017 !

Affronter Marine Le Pen au second tour de 2017 et emporter la présidentielle. Un jeu dangereux.

Le poids démesuré de l’élection présidentielle dans la vie politique française est tel que tous les regards sont déjà braqués sur 2017. Les prétendants affûtent leur stratégie pour la conquête de l’Élysée.

La question de l’intérêt des Français n’est plus qu’un argument de campagne. Dans ce contexte, pour les principaux prétendants PS et UMP que sont aujourd’hui François Hollande et Nicolas Sarkozy, l’influence importante du Front national n’est plus un problème démocratique, ni le signe d’un échec politique mais une nécessité pour l’emporter. La distorsion politique induite par la présidentielle fait qu’aussi bien Hollande que Sarkozy, mais également les anciens premiers ministres de droite Alain Juppé, François Fillon et consorts basent tout sur la présence de Mme Le Pen au second tour.

La seule question que tous se posent, c’est qui accompagnera la candidate frontiste. Celle-ci peut être tranquille, elle sait déjà que la campagne tournera autour de sa personne, lui garantissant du même coup une omniprésence médiatique dans la position de celle qui serait en rupture avec « l’UMPS ». Car l’analyse est symétrique chez Nicolas Sarkozy et François Hollande: celui qui sera face à la fille Le Pen au second tour deviendra président de la République.

Dans les deux camps, PS et UMP, on juge que pour assurer une présence au second tour il s’agit d’être le seul candidat crédible de son camp. Le chef de l’État est tellement obnubilé par 2017 qu’il évacue la question de la contestation de sa politique actuelle par ceux qui ont voté pour lui et le changement en 2012. Peu importe le niveau de mécontentement à gauche, estiment les stratèges de l’Élysée, la perspective de voir un second tour sans candidat de gauche avec Sarkozy reprenant les commandes suffira à recréer une majorité autour de François Hollande.

Ce dernier fait d’ailleurs une surprenante analyse de la dernière séquence électorale, notamment des élections européennes, rapporte le magazine « VSD », expliquant que le président aurait déclaré au soir du 25 mai: « Ils ont tous perdu cette élection. Je suis le seul vainqueur. La percée du FN? Une victoire en trompe-l’œil, selon le président. Les Verts? (…) Ils se sont effondrés. Ils n’auront pas de candidat crédible en 2017. Mélenchon? Il plafonne à 6 %. Pas un suffrage de plus qu’en 2009. L’UMP ? En cinq ans, elle a perdu un quart de ses voix. »

Pour François Hollande, la stratégie va donc consister à tenter de décrédibiliser ceux, à gauche, qui pourraient se présenter pour porter une alternative. Un seul argument sera employé : ils prennent le risque d’une élimination de la gauche dès le premier tour. François Hollande sait pertinemment qu’il y aura d’autres candidats à gauche mais il fait le pari que l’électorat fera le choix du vote utile pour éviter un nouveau 21 avril.

Côté Sarkozy, même logique.

L’ancien président de la République a élaboré son plan de marche : d’abord la conquête de l’UMP pour s’assurer une base militante et éviter des primaires. Ensuite discréditer ses concurrents à droite avec l’argument d’un risque d’un 21 avril à l’envers. Puis réussir à se qualifier pour le second tour afin d’être celui qui affrontera Mme Le Pen.

Un plan bien huilé sauf si la justice le rattrape… Ce que ne souhaite pas François Hollande. Pour lui, une partie de l’UMP et du centre s’opposera à la reconquête du pouvoir par l’ancien chef et en conséquence Fillon ou Juppé, voire François Bayrou (MODEM), se présenteront, divisant ainsi les suffrages de la droite et du centre.

Reste qu’à miser leur avenir politique sur la carte Le Pen, François Hollande comme Nicolas Sarkozy misent également l’avenir de la France. Car rien ne prouve qu’au second tour, l’un ou l’autre serait en mesure de rassembler, y compris face au danger FN qu’ils auront tellement contribué à faire grandir.

Déjouer un tel scénario implique que grandisse en France l’idée qu’une alternative de gauche à la politique actuelle est possible. Seule manière possible pour que le débat se mène sur des questions de fond et non sur des enjeux politiciens porteurs de toutes les dérives et de tous les dangers.

Stéphane Sahuc HD 17-23 juillet 2014