LA GAUCHE FRANCAISE PEUT MOURIR !

Oui mais de quelle gauche parle-t-on et même, cette interpellation lancée par Valls devant le CN du PS, n’est-elle pas dictée par la posture d’une Ve république devenue obsolète, d’un gouvernement et d’un premier ministre, ce dernier ne reniant pas d’être très proche d’un centrisme libérale, cette affirmation a quelques saveurs rances. MC

En quelques mots, lancés samedi matin de la tribune du Conseil national, Manuel Valls a jeté un froid dans la majorité. A la veille de la discussion au Parlement sur les deux textes traduisant le pacte de responsabilité, le Premier ministre a bien sûr cherché à créer, si ce n’est un électrochoc, du moins une prise de conscience. (…) Manuel Valls met en garde alors partie du PS se cabre : « Le temps où l’on pouvait accroître la dépense publique, et combattre les déficits par la hausse de l’impôt, est révolu. Cette méthode est devenue un handicap. Elle empêche l’État d’investir dans les secteurs stratégiques et étouffe ses marges de manœuvre. » Réduire la dépense publique et restaurer la compétitivité des entreprises resteront donc les deux axes de la politique du gouvernement. (…)

Mais toute une partie de la gauche traditionnelle et une partie des adhérents et élus du PS, refusent désormais de soutenir la politique de François Hollande, mise en œuvre par Manuel Valls.

Les communistes bien sûr, qui n’ont d’ailleurs jamais fait partie de la majorité gouvernementale. « Il faut changer de politique, martèle ainsi Pierre Laurent, secrétaire national du PC. Je le dis aux femmes et aux hommes de gauche, travaillons ensemble, construisons ensemble une politique de gauche, un projet de gauche. »

Son de cloche identique côté écologiste, dont l’appartenance à la majorité est désormais en question : « Il faut une politique de gauche et des actions de gauche », répond au Premier ministre Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d’EE-LV. Le parti écologiste a voté à l’unanimité samedi le rejet des orientations du collectif budgétaire.

Certains députés socialistes « frondeurs » rejoignent le chœur : la politique de François Hollande et Manuel Valls « ne va pas marcher économiquement, et va mettre nos électeurs encore plus en colère contre nous », déclarait ainsi dimanche Laurent Baumel sur Canal+, traduisant bien la grande peur, au fond, des parlementaires socialistes, qui motive en grande partie la contestation : celle de ne pas retrouver leur siège en 2017.

Le réflexe, après de sévères défaites électorales, est invariablement d’appeler à la reconstitution de l’union de la gauche. Cela n’a pas manqué ce weekend : certains de ces députés PS frondeurs, qui se réunissaient samedi à la mairie du 11e arrondissement de Paris, réfléchissent à un « rassemblement à gauche » avec le Front de Gauche et les écologistes. Cette « minorité active » du PS, comme l’appelle le premier secrétaire Jean-Christophe Cambadélis, « n’a pas de stratégie commune » avec les autres formations de gauche, ni de « stratégie claire », selon un ministre. « Ils ne cherchent pas à négocier pour infléchir la politique menée, mais simplement à mener la guerre contre François Hollande », veut croire ce membre du gouvernement.

De fait, Emmanuel Maurel, l’un des leaders de l’aile gauche du PS, a fait la preuve que les arrière-pensées politiques ne sont pas absentes, en réclamant samedi la tenue d’une primaire au sein du PS en 2016 pour désigner le candidat à l’élection présidentielle de 2017. François Hollande est bien-sûr visé. « La litanie des congrès du PS ont été autant d’occasions manquées, notamment ceux de Reims (2008) et de Toulouse (2012) »

Cette « minorité active » peut cependant mettre en péril la majorité parlementaire de François Hollande, en ne votant pas les textes budgétaires dans les semaines qui viennent. Il y a donc péril en la demeure. (…)

« Si une partie du PS se cabre devant l’obstacle, c’est qu’il y a un décalage croissant entre les contraintes du pouvoir et l’idéologie du PS, qui elle ne change pas, analyse Gérard Grunberg, professeur au Centre d’études européennes de Sciences Po. D’autre part, (…), il n’y a plus de leadership du président de la République, et Manuel Valls n’est pas aimé, car trop aux marges du PS ». (…)

Alors que la gauche dans son ensemble ne pèse plus que 30% des voix, le Parti socialiste peut-il encore gouverner la France ? « On est dans une incertitude comme on n’en a pas connue depuis 1981, répond Gérard Grunberg. La gauche peut effectivement mourir comme force de gouvernement. (…)

« Nous sentons bien que nous sommes arrivés au bout de quelque chose, au bout peut-être même d’un cycle historique pour notre parti », observait Manuel Valls samedi.

Avec le vote du budget rectificatif, le moment de la clarification approche.

Segaunes Nathalie, L’Opinion – Permalien