L’impôt le plus injuste : la TVA …

Le 10 avril 1954 : naissance de la TVA.

Il y a soixante ans, la TVA (taxe sur la valeur ajoutée), cet impôt indirect que tout le monde paye, voyait le jour. Un anniversaire qui résonne d’autant plus aujourd’hui que le gouvernement Hollande, qui n’est pas à une contradiction près, n’exclut pas de financer davantage la Sécurité sociale via des impôts indirects comme la TVA ou la CSG. À ce stade, un petit rappel historique s’impose.

À l’époque, lorsque cette taxe est votée par l’Assemblée nationale, c’est une véritable révolution fiscale.

Les deux taxes (à la production et sur les transactions) sur la consommation disparaissent au profit de la TVA. Il existe alors deux taux (16,8 % et 7,5 %) et seules les grandes entreprises doivent s’acquitter de la TVA.

En 1966, le ministre des Finances de l’époque, Valéry Giscard d’Estaing, étend son champ d’application à l’ensemble des acteurs économiques et donc à tous les produits et services. Il crée également le taux intermédiaire à 12 %. Dès lors, le taux de la TVA n’a cessé d’augmenter.

La France, le pays où la fiscalité indirecte est la plus élevée

En 2007; François Fillon annonce l’ouverture du chantier de la « TVA sociale ». Le but étant d’augmenter d’un à deux points les taux de TVA pour ensuite redistribuer le surplus de recettes fiscales en diminuant les cotisations sociales qui pèsent sur les salaires. Votée par le Parlement au printemps 2012 juste avant la défaite de Nicolas Sarkozy, la « TVA sociale » est finalement abrogée par les députés de la nouvelle majorité dès le mois de juillet, conformément à une promesse de campagne de François Hollande, qui dénonçait une mesure amputant le pouvoir d’achat.

De fait, les consommateurs s’acquittent seuls de cet impôt sur la nourriture, l’habillement, l’énergie, etc.

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Les entreprises, elles, se font rembourser la TVA payée sur leurs achats.

Certes, le paiement est plutôt incolore, car lorsqu’on passe en caisse, on n’a pas l’impression de payer un impôt Pourtant, les taux d’imposition ne sont pas négligeables (20 %, 10 % et 5,5 %). Et vu que tout le monde paye le même montant, cet impôt indirect est très injuste car il pèse très lourd dans le budget des ménages les plus modestes.

En clair, plus les revenus des personnes augmentent, moins l’effort contributif est important (lire encadré). Alors que le monde entier a adopté la TVA, la France est l’un des pays où la fiscalité indirecte (taxe comprise dans le prix d’un bien ou d’un service) est la plus élevée. Et son rendement est énorme : au total, les recettes nettes de TVA se sont élevées à 137,8 milliards d’euros en 2012 (51,7 % des recettes fiscales nettes de l’État) et 141,2 milliards d’euros en 2013… soit le double de ce que rapporte l’impôt sur le revenu.

Une imposition facile et rentable, qui se voit peu et se révèle efficace. Les dirigeants français successifs ont bien compris qu’il est plus aisé de faire payer « peu » au plus grand nombre que « plus » à une minorité de contribuables. Une voie d’autant plus intéressante pour un gouvernement qui veut restaurer les finances publiques malmenées par la crise sans s’attaquer à la finance ni aux inégalités de revenus.

C’est la voie qu’a choisie François Hollande, en décidant d’augmenter la TVA au1er janvier 2014. Destinée à financer le Cice, cette hausse vise à faire baisser le « coût du travail » des salariés gagnant jusqu’à deux fois et demie le Smic de 4 % en 2014 et de 6 % en 2015. Soit une baisse globale des charges de 10 milliards d’euros l’an prochain et de 20 milliards dans deux ans.

Manuel Valls est arrivé à ses fins sur la baisse du « coût du travail »

« C’est une baisse des prélèvements sur les entreprises que j’assume », avait alors rétorqué le président de la République. D’aucuns y ont vu le retour de la TVA sociale instaurée à la toute fin du quinquennat de Nicolas Sarkozy, que le gouvernement de François Hollande ‘avait pourtant abrogée quelques mois plus tard… Qu’importe les contradictions. Et Manuel Valls va poursuivre sur cette lancée.

Mardi (08 avril 2014), lors de son discours de politique générale à l’Assemblée nationale, le nouveau premier ministre a été parfaitement clair : pour arriver à 50 milliards d’euros d’économies d’ici à la fin du quinquennat, il faut un « changement de rythme pour éviter tout recours à l’impôt ». À l’impôt direct, aurait dû préciser celui qui militait déjà en 2011, alors qu’il était candidat à la primaire socialiste, pour « une augmentation ciblée et modérée de la TVA en substitution d’une part des charges sociales payées par l’employeur », autrement dit la « TVA sociale ».

Aujourd’hui à la tête du gouvernement, il est parvenu à ses fins sur la question de la baisse du « coût du travail », révélant notamment qu’à partir de 2015, les cotisations patronales à l’Urssaf seraient « entièrement supprimées ».

Alexandra Chaignon – Huma quotidien 10 avril 2014

 

UNE TAXE INÉGALITAIRE

La TVA représente une part deux fois plus élevée du revenu des ménages les plus pauvres que celui des plus riches. Une étude de 2001 montrait que les 10 % des ménages les plus démunis payaient 1.888 euros de. TVA, ce qui représentait 16,6 % de leurs revenus, alors que les 10 % des ménages les plus aisés s’acquittaient de 4.606 euros, soit moins de 8 % de leurs revenus. Avec l’impôt sur le revenu, le taux augmente avec le niveau de vie, avec la TVA, il diminue.