L’ absurdité de la « prévention programmée » !

A Chicago, la police utilise les précogs du XXle siècle, des algorithmes qui identifient avant l’heure, non pas les crimes, mais les criminels.

En compilant des données sur les habitants, en fonction de délits mineurs qu’ils ont pu commettre, de leur quartier, de leur profession ou non-profession, la police de Chicago a établi une liste de quatre cents noms.

Le « Chigaco Tribune » raconte que Robert Mc Daniel, un habitant de la ville, a reçu la visite – courtoise, est-il précisé – de la police lui demandant d’éviter de perpétrer un crime, quel qu’il soit.

Pourtant, Robert n’a rien à se reprocher. Pas encore… insinuent les autorités. Ce dispositif part d’un bon sentiment officiel : c’est de la « PRE-VEN-TION ».

Les futurs, peut-être, éventuels criminels, « grâce » à cela, peuvent recourir à une aide plus efficace pour trouver un boulot ou demander l’aide des services sociaux. Et le procédé n’est pas complètement nouveau.

Il y a trois ans, dans d’autres villes des Etats-Unis, on apprenait que la police utilisait un algorithme, conçu initialement pour détecter les tremblements de terre, afin de situer les zones géographiques où le prochain crime est susceptible de se produire.

Finies les enquêtes laborieuses, à base de minces indices et témoignages approximatifs, les meurtres seront pris en flag.  Encore un peu de travail sur les calculs et le GIGN débarquera à la maternité pour arrêter un potentiel tueur en série, qui, dans vingt ans, sans doute, va découper ses victimes en morceaux de dix centimètres pour les recoudre à l’envers.

Un message avertira la boulangère que le garçonnet qui vient d’entrer est bien moins innocent qu’il en a l’air et a la ferme volonté de subtiliser discrètement une fraise Tagada.

« Lâchez ce chien! » s’entendra hurler cet octogénaire qui promène un diable de yorkshire, deux minutes avant qu’il ne commette son délit sur le trottoir.

Menottes aussi pour le misérable garagiste qui a bien failli nous proposer de changer les cardans, en très bon état pourtant.

A ce rythme-là, les cours des prisons vont vite être pavées de mauvaises intentions.

Nicolas Carreau – Les Inrockuptibles N° 954