Alors que des guerres internes déchirent nombre de pays africains. Confrontée aux stratégies de pénétration économique de l’Occident et de la Chine, l’UNION AFRICAINE doit retrouver une cohésion politique pour affirmer le rôle d’intégration et de pacification fixé à sa création, il y a plus d’une décennie.
Du sang et des larmes, dans la terreur, le dénuement et l’impuissance… tel est le sort tragique de populations civiles africaines prises au piège de luttes féroces pour le pouvoir qui débouchent sur des déchirements ethniques et confessionnels, à l’image de l’épisode que vivent les Centrafricains.
Dans ce pays, l’intervention française annoncée tambour battant et qui était supposée venir au secours des habitants a fait chou blanc. Le déploiement de troupes dans la capitale, Bangui, n’a pas freiné les tueries, ni empêché l’exode de familles terrorisées. Le pays est désormais suspendu à un filet d’espoir : l’entrée dans une phase de transition sous la présidence de Catherine Samba-Panza, ex-maire de Bangui.
Face à cette tragédie, du Soudan du Sud où on enterre les milliers de morts d’une guerre pour le pouvoir, à la Libye plongée dans le chaos sous la coupe des milices armées, au Mali qui renaît à peine de ses cendres sous la menace permanente des hordes d’intégristes islamistes et à l’Égypte qui amorce un tournant politique dans l’incertitude, l’Union africaine (UA) se distingue par son absence et son impuissance.
L’HISTOIRE DE L’IMPUISSANCE
Créée en 2002 à Durban (Afrique du Sud) sur les décombres de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) qui collectionnait les échecs politiques et économiques, l’Union africaine s’était pourtant fixé des objectifs d’intégration et de pacification du continent.
L’organisation est même supposée intervenir « dans certaines circonstances graves, à savoir les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l’humanité ». Triste constat qui s’impose aujourd’hui : l’institution est incapable d’imposer la moindre solution aux déchirements du continent, alors même que les puissances occidentales ont multiplié les interventions aux conséquences catastrophiques.
« La cause de cette impuissance est à rechercher dans la dimension historique », explique André Bourgeot, directeur de recherche émérite CNRS au laboratoire d’anthropologie sociale, spécialiste de l’Afrique. Le chercheur retient l’hypothèse « d’une marginalisation de l’UA par les puissances occidentales et l’ONU, au point où l’on se demande même si elle existe toujours ». II rappelle qu’elle s’était opposée, en vain, au bombardement de la Libye. « Il semble que les organisations régionales (CEDEAO, CEMAC) (1) servent davantage de relais que l’UA », précise-t-il.
Des « relais » qui ouvrent les voies de pénétration économique aux grandes puissances. Celles-ci n’ont en effet aucun intérêt au renforcement d’une institution à l’échelle continentale qui poursuit des objectifs d’intégration, à l’image de l’Union européenne. Elles préfèrent une Afrique en rangs dispersés, modèle idéal pour l’implantation des firmes tentaculaires et le partage des ressources naturelles.
Le sommet de chefs d’État africains à l’Élysée (6 et 7 décembre 2013) participe de cette manœuvre. La France réactive sa politique africaine pour se préserver des marchés face, notamment, à la montée en puissance des entreprises chinoises. Le capitalisme en crise n’a d’autre issue que le redéploiement sur le continent africain. La bataille concurrentielle s’accélère tout autant que les tractations et les manœuvres internationales autour des sources de tension.
Confrontée aux stratégies de pénétration des grandes puissances, l’Union africaine se doit de trouver une cohésion politique pour opposer des ripostes dans l’intérêt du continent. La Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) ne désespère pas de la voir s’affirmer. Elle l’appelle à « prendre la mesure des défis posés par la perpétration de violations graves et massives des droits humains ».
Mais encore faut-il pouvoir s’appuyer sur la volonté politique de chefs d’État empêtrés dans des luttes de pouvoir ou occupés à accumuler des richesses. Sans compter les rivalités de leaderships régionaux à l’image de la bataille qui oppose par exemple deux alliés de la France, le Tchadien Idriss Déby et le Congolais Denis Sassou-Nguesso.
NADJIB TOUAIBIA – HD N°21348
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(1) Communauté économique et monétaire des États de l’Afrique centrale. Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest