Une étude menée pour l’hebdomadaire La vie fait le point sur l’attitude des catholiques face à Marine Le Pen et à son parti.
Les cathos demeurent massivement de droite, mais leurs valeurs morales font (encore) rempart vis-à-vis de l’extrême droite. C’est la conclusion de l’étude de Paradox’Opinion, basée sur une méthodologie incluant une rare et bonne compréhension du fait religieux.
Autrement dit, elle s’intéresse aux catholiques pratiquants, ceux qui vont régulièrement à la messe, et pas aux catholiques sociologiques, ceux qui sont nés catholiques mais s’en fichent.
- En 2012, 45% de ces pratiquants ont voté Sarkozy. Jusqu’à 52 % en Ile-de-France.
- Héritier de la démocratie chrétienne, François Bayrou ne recueillait que 17%, quatre points de plus que sa moyenne nationale.
- Marine Le Pen n’obtenait que 15,5%, en retrait par rapport à son score national.
- François Hollande réalisant un maigre 24%
- Mélenchon, 7%,
Le rapport entre « grande droite » et « grande gauche » est écrasant.
À l’intérieur de la droite catholique, une tectonique des plaques est toutefois en train de faire bouger les traditions.
- En premier lieu, la démocratie chrétienne perd de sa force et la nouvelle alliance du MoDem et de l’UDI porte un nom, l’Alternative, qui ne s’inscrit pas dans cette tradition. Comme si le tandem centriste cherchait à s’affranchir de son image d’UDF remise en selle, pour s’affirmer comme un recours pour tes électeurs dégoûtés du système, y compris ceux tentés par le vote FN.
- Il faut ensuite réaliser que, massivement, tes catholiques pratiquants se portent sur l’UMP sans pour autant partager réellement son projet politique. Ce qui leur importe, c’est la notion, centrale pour eux, de légitimité. (…) … les catholiques, même très conservateurs, préfèrent voter pour un parti de gouvernement que pour le FN.
- Le Front National n’attire que 7% des pratiquants, bien moins que la moyenne, et bien plus que la moyenne à rejeter la personnalité de Marine Le Pen : 66% contre 61%.
La faute à quoi ?
Aux valeurs catholiques.
Par exemple, l’hostilité au rétablissement de la peine de mort et l’attachement à l’économie de marché, que le discours néo Étatiste et protectionniste du FN prend à contre-pied. N’oublions pas que le catholicisme est une religion universaliste et prosélyte: la notion de frontières ne lui est pas consubstantielle, la mondialisation lui convient, puisqu’elle peut signifier la propagation de la foi, l’Europe est son cadre historique de référence.
Pour autant, les catholiques aussi sont aux prises avec la question de l’identité et du retour des valeurs morales.
Tout cela dans un contexte où 46% ne font plus confiance ni à la droite ni à la gauche pour gouverner, la droite subissant un désamour particulièrement fort depuis la présidentielle.
Un catholicisme identitaire émerge-t-il?
Un peu.
- 41% des catholiques pensent que l’islam est une menace pour l’Occident (11 points de plus en un an) ;
- 37% pensent qu’il y a trop d’immigrés en France (plus 12 points en un an).
- En corollaire, les thèmes de l’assistanat et de la préférence nationale dans l’emploi progressent.
Plus fondamental, il existe une cassure générationnelle dans le milieu catho, qui sépare les moins de 35 ans des autres.
- seulement 25% des tranches d’âge supérieures à 35 ans apprécient Marine Le Pen, elle a une cote de 35% chez les plus jeunes, qui sont aussi bien moins libéraux en économie, plus réservés sur la globalisation, mais aussi réticents que leurs aînés envers l’islam et l’immigration.
- Les catholiques de moins de 35 ans ont aussi formé de gros bataillons de manifestants anti-mariage pour tous. Ils sont la génération anti permissive du contre Mai 68.
Disponibles pour un FN qui leur paraît normalisé? On le saura aux européennes. (…)
Jean-Yves Camus – Charlie Hebdo N°1121 – Extrait.
Voir l’article de « La Vie » Permalien