Pas mal cet Edito mais pour ma part j’aurais préféré qu’on ajoute un volet géopolitique et financier expliquant les intérêts économiques résultants des enjeux du Moyen-Orient en général, et se servant d’État ou les dictateurs sévissent pour faire croire à l’opinion mondiale que les résidents de ces pays seront plus libres après la destitution du régnant en place, sans pour autant expliquer à la population qu’elle risque de tomber de Charybde en Scylla, d’un État dictatorial « privé » en une dictature religieuse extrémiste… MC
1. En 2003, la France, seule contre tous, refusait de faire la guerre d’Irak aux côtés de la coalition anglo-américaine. Le moins que l’on puisse dire est que l’histoire a largement donné raison à Jacques Chirac et Dominique de Villepin.
Dix ans plus tard, il n’a fallu qu’une semaine pour que la France se retrouve seule à vouloir absolument frapper la Syrie le plus vite possible, sans le moindre projet politique et sans passer par la case Parlement. Seule avec des États-unis d’Amérique plus si sûrs de tenir à faire respecter la « ligne rouge sur l’emploi d’armes chimiques » qu’avait tracée leur Président, désormais empêtré dans ses propres déclarations de principe.
Finalement, cette alliance américano-française restaurée devra attendre le retour de vacances des parlementaires américains pour se concrétiser d’un point de vue militaire. Peut-être.
François Hollande a l’air malin, lui qui paraît décidément apprécier de faire la guerre quand bon lui semble, sans consulter la moindre assemblée, selon un atlantisme si grossier et si caricatural qu’il faut remonter à Guy Mollet et à la pathétique expédition de Suez – votée par le Parlement, nous étions sous la Ve République – pour en dénicher un équivalent social-démocrate.
2. Les câbles diplomatiques américains révélés par WikiLeaks il y a deux ans mettaient à jour le défilé de toute la classe politique française à l’ambassade des Etats-Unis à Paris. A propos de l’Irak, les sarkozystes et les socialistes disaient à peu près la même chose : Chirac et Villepin avaient tort, il fallait faire la guerre avec vous. Ou bien, dans une version plus modérée, celle de Moscovici et Hollande en juin 2006, promettre qu’un président socialiste ne serait ni sur la ligne Chirac, ni sur la ligne Tony Blair. Depuis une semaine, Hollande est infiniment plus proche de Tony Blair que de Jacques Chirac. Ils doivent tout de même être étonnés, à Washington. Après Sarkozy « l’Américain », voilà Hollande et ses postures martiales. Leur empressement en deviendrait même embarrassant…
3. Quand j’ai voté Chirac au second tour de la présidentielle de 2002, sans aucun enthousiasme, encore traumatisé par un certain 21 avril mais bien conscient du ridicule de la situation, je ne pouvais imaginer qu’il aurait le courage, moins d’un an plus tard, de résister à Bush. Disons que pour une fois, j’ai été récompensé de mon vote contraint. Je me souviens aussi m’être dit que Jospin et Védrine l’auraient faite, eux, la guerre de Bush. C’était avant les révélations de WikiLeaks à propos des dirigeants socialistes venant faire la queue à l’ambassade des Etats-Unis et la semaine d’août 2013 où François Hollande s’est transformé en Guy Mollet. On a des intuitions, parfois.
4. Le pire reste le choix des mots : « La France est prête à punir ceux qui ont pris la décision infâme de gazer des innocents » a déclaré François Hollande le 27 août. Ce punir-là ne passe pas. Si gazer qui que ce soit est effectivement infâme, comme l’ont fait Saddam Hussein et ses alliés de la CIA avec les soldats iraniens en 1988, comme est infâme de répandre 80 millions de litres d’« agent orange » (un défoliant, une arme tout à fait chimique) sur le Vietnam et ses voisins, comme l’a fait l’armée américaine à partir de 1961, ni la France, ni les Etats-Unis n’ont le droit de « punir » qui que ce soit. Surtout sans mandat de l’ONU.
5. Trop de mensonges, trop de « bavures », c’est fini, messieurs, on ne vous croit plus.
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Edito des Inrockuptibles N°927 Signé de Frédéric Bonnard
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