Droit du travail. Ce qui vous attend avec la nouvelle loi (ANI)

La loi dite de « sécurisation de l’emploi », transcrivant l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier, a été promulguée le 14 juin. Un certain nombre de ses dispositions sont entrées en vigueur dès le 17 juin, d’autres le seront plus tard.

Rappel des principaux changements.

La flexibilité, c’est fait. Les quelques droits nouveaux vantés par les promoteurs de l’ANI, ce sera plus tard. Voilà en gros le calendrier d’application des mesures de la récente loi « relative à la sécurisation de l’emploi ».

Depuis le 17 juin

Accords de maintien de l’emploi. Les employeurs peuvent, au nom de « graves difficultés » de l’entreprise -après avoir obtenu la signature des syndicats ayant réuni 50 % des voix aux élections professionnelles -, « aménager » pendant deux ans temps de travail et salaire (petit garde-fou : pas de baisse des salaires inférieurs à 1,2 SMIC, mais rien n’empêche de les geler), moyennant des engagements de maintien de l’emploi. Ceux qui refuseraient seront passibles d’un licenciement économique. Même si 10 personnes, ou plus, refusent, il n’y aura pas de plan social.

Mobilité forcée.

Les employeurs peuvent, après avoir obtenu la signature des syndicats totalisant 30 % des voix, imposer à leurs salariés d’être mutés vers d’autres sites. Ceux qui refuseraient seront passibles d’un licenciement économique. Là encore, même en cas de refus de 10 personnes, ou plus, il n’y aura pas de plan social.

Temps partiel flexible.

Un employeur peut, par avenant au contrat de travail – et ce, huit fois dans l’année -, augmenter temporairement la durée du travail d’un salarié à temps partiel, sans que ces heures soient considérées comme des heures complémentaires et donc mieux rémunérées.

La durée minimale de 24 heures par semaine pour les temps partiels (sauf dérogations multiples) ne s’appliquera en revanche qu’au 1er janvier 2014, et même 1er janvier 2016 pour les contrats en cours.

Durée de prescription.

Les durées de prescription pour entamer des actions aux prud’hommes sont abaissées de 5 à 3 ans pour les litiges portant sur les salaires et à 2 ans pour ceux portant sur l’exécution du contrat de travail et sa rupture.

Au 1er juillet

Licenciements économiques collectifs.

Les employeurs pourront procéder à des licenciements économiques collectifs avec procédure et plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) allégés : délais de consultation du comité d’entreprise réduits, possibilité pour l’employeur de choisir entre un PSE dont le contenu est fixé par un accord collectif ou par un document qu’il fait homologuer sous vingt et un jours par la Direction régionale des entreprises, de la concur­rence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE).

Contrats à durée déterminée.

Petit désagrément pour les employeurs : il y aura une hausse de la cotisation d’assurance chômage pour les CDD liés à des surcroîts d’activité (+ 3 points pour les contrats de moins d’un mois, + 1,5 point entre un à trois mois) et les CDD dits d’usage (+ 0,5 point). Les contrats saisonniers ou de remplacement sont exonérés de cette hausse.

Exonération pour l’embauche d’un jeune.

La petite taxe sur les CDD est compensée par un nouveau cadeau : trois mois d’exonération de la cotisation d’assurance chômage patronale pour l’embauche en CDI d’un jeune de moins de 26 ans.

Au 1er janvier 2014

Droits rechargeables à l’assurance chômage. Les chômeurs devraient pouvoir conserver plus facilement leur reliquat de droits à indemnisation quand ils retrouvent un emploi.

Les règles seront fixées dans le cadre de la nouvelle convention UNEDIC, qui va être négociée à l’automne entre patronat et syndicats. Reste à trouver le financement.

Idées du MEDEF : limiter le niveau d’indemnisation ou rétablir la dégressivité !

Formation.

Le compte personnel formation, individuel et transférable, remplacera le droit individuel à la formation. Il pourra bénéficier de financements complémentaires de l’État et des régions, après concertation avec le patronat et les syndicats et une négociation nationale interprofessionnelle.

Avant la fin 2014

Représentation des salariés.

Les grands groupes (5000 salariés en France ou 10000 dans le monde) devront avoir modifié les statuts de leurs conseils d’administration pour intégrer un à  « au moins deux » salariés dans les organes de décision. Information partagée en amont.

D’ici à l’été 2014 (soit un an après un décret prévu pour cet été), dans les entreprises de plus de 300 salariés, l’employeur devra mettre à disposition des représentants des salariés une base de données économiques et sociales.

Le délai est allongé d’un an pour les entreprises de moins de 300 salariés.

Au 1er janvier 2016

Généralisation de la complémentaire santé.

Toutes les entreprises devront proposer une complémentaire santé à leurs salariés et la financer au minimum à 50 %.

Le Conseil constitutionnel ayant invalidé la clause de désignation (qui permettait, par accord de branche, de désigner un opérateur unique pour toutes les entreprises de la branche et donc de mutualiser les coûts et les tarifs), les salariés des petites entreprises paieront beaucoup plus cher.

Dominique Sicot –  Huma dimanche N°21198