Il y a un an et quelques mois, le candidat François Hollande désignait« le monde de la finance » comme son « adversaire », lors d’un discours resté célèbre prononcé au Bourget.
Un an et quelques mois plus tard, le bilan est des plus mitigés. Si quelques réformes ont été votées, des voix nombreuses à gauche l’enjoignent de mener plus loin le combat.
Le « long combat » promis par François Hollande contre « le monde de la finance » est-il toujours d’actualité?
Il y aura un an jour pour jour, demain, le candidat Hollande lançait sa campagne au Bourget (Seine-Saint-Denis), avec un discours qui restera dans les annales de l’élection présidentielle. Ou plutôt un passage de ce discours, désormais célèbre. « Mon véritable adversaire, déclarait, ce 22 janvier 2012, François Hollande, n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti. Il ne présentera jamais sa candidature, il ne sera donc pas élu, et pourtant il gouverne. Cet adversaire, c’est le monde de la finance. » Et le candidat socialiste de promettre, devant 25 000 de ses partisans, de « l’affronter avec nos moyens et d’abord chez nous, sans faiblesse mais sans irréalisme ».
Cette subite inflexion n’était certes pas gratuite: elle visait, tout à la fois, à prendre en compte la montée d’une gauche combative dans le sillage du Front de gauche et de son candidat, Jean-Luc Mélenchon (crédité pour la première fois de 9 % des voix le 26 janvier, par CSA), et à concrétiser la rupture revendiquée avec la politique sarkozyste.
Des résultats loin de l’ambition affichée
Un an plus tard, le bilan n’est pas nul. Loi bancaire, création de la Banque publique d’investissement, élargissement de l’assiette de l’impôt sur le revenu à certains revenus du capital sont à mettre au crédit de la nouvelle majorité. Mais le résultat est encore loin de l’ambition affichée au Bourget. Pis, cette dernière semble s’être évanouie, au profit d’autres priorités, comme la « compétitivité »de l’économie française et la réduction des déficits publics.
Sur le volet fiscal, le gouvernement assume désormais une pause durable, comme l’a déclaré le ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, sur France 2, face à Jean-Luc Mélenchon, le 7 janvier, assurant que la réforme fiscale était « faite ». Quant à la réorientation de l’Europe, elle a tout bonnement disparu des chantiers de l’année qui commence dans les vœux du président aux Français, le 31 décembre.
Autant de revirements inquiétants mais qui ne constituent pas vraiment des surprises, au regard des orientations développées durant sa campagne par François Hollande. Ainsi, en février 2012, le candidat s’employait déjà à rassurer la place financière londonienne, la City, affirmant au Guardian qu’elle n’avait « rien à craindre de son action pour réguler davantage le monde financier ».
Aujourd’hui, le dilemme reste entier: affronter la finance ou composer avec elle?
Face à ce qui est perçu comme un renoncement du pouvoir, des voix s’élèvent à gauche pour renouer avec l’esprit du Bourget. La sénatrice PS Laurence Rossignol a ainsi critiqué une réforme bancaire qui n’est « pas à la hauteur des mots »et plaidé pour « transformer les règles dans la durée ».
D’autres, à l’instar d’une quinzaine de députés PS, réclament une « révolution fiscale redistributive » Et pour le Front de gauche, Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, a donné le ton, lors de ses voeux, le 14 janvier: « Il n’est pas question pour nous d’enfiler les habits du renoncement. Pour sortir le pays de la crise, nous croyons plus que jamais nécessaire et possible de rompre avec les logiques de la finance. »
Sébastien Crépel – HD-2013