La publication des patrimoines des élus donne une impression de transparence. Mais la fraude est par essence cachée.
Elle affiche clairement la composition des élus avec un constat alarmant pour la représentation démocratique de la France : disparition de la représentation des couches populaires, renforçant le divorce entre le peuple et les élites. Les ouvriers et les employés représentent la moitié de la population active mais comptent respectivement pour 0,2% et 2,4 % à l’Assemblée.
Depuis le 15 avril, les Français connaissent le patrimoine de leurs ministres. Il a donné lieu à un inventaire à la Prévert parfois humiliant.
Avec les mesures de « moralisation » de la vie politique, les députés vont bientôt devoir faire de même. Le procédé a fait parler. Mais quelles seront ses implications réelles sur la vie politique?
Hormis l’impact de la durée très relative d’un tel scoop médiatique, cette transparence nouvelle ne changera pas de fond en comble les données du problème, à savoir les éventuelles collusions entre les politiques et les milieux financiers…
L’ensemble de la population pense à juste titre qu’il s’agit d’une « mascarade ». «
C’est une stratégie de communication permettant de cacher le problème de la responsabilité collective de la classe politique ».
La loi punit la fraude fiscale. Or, celle-ci est un phénomène massif, coûtant aux finances publiques autour de 50 milliards d’euros par an, selon les sources. À l’échelle de l’Union européenne, le préjudice avoisinerait les 1.350 milliards d’euros…
Sur la question de la fraude donc, « Il ne s’agit pas de connaître dans le détail la vie privée des élus de la République, mais de lutter véritablement contre la fraude et l’évasion fiscale », Olivier Dartigolles.
La publication des patrimoines des ministres, affiche en tout cas au grand jour les inégalités entre la masse des citoyens et ceux qui sont en charge des affaires du pays. Les Français peuvent ainsi lire ce qu’ils ressentaient déjà : les élites qui dirigent leur pays, jusque dans les rangs de l’Assemblée nationale, ont par leur niveau de vie des préoccupations bien différentes des leurs.
Avec 0,2 % d’ouvriers et 2,4 % d’employés, la représentation nationale est sociologiquement bien peu représentative de la société française. Les institutions de la Ve République sont en grande partie responsables de ce manque de représentativité.
Pour être élu aujourd’hui, en l’absence d’un véritable statut de l’élu, il faut en avoir les moyens. Quand on appartient au monde du travail, il est très difficile de s’impliquer dans la vie politique… sauf si l’on y fait carrière. D’où la surreprésentation des professions libérales (15,4 %) et des cadres et ingénieurs (20,3 %).
Aux États-Unis, royaume de la transparence (les patrimoines sont systématiquement décortiqués), ce n’est pas forcément le candidat le plus riche qui l’emporte, mais sa richesse lui sert toujours d’argument de campagne : s’il a fait prospérer ses affaires et créé quelques milliers d’emplois, il essaiera de convaincre les électeurs qu’il saura reproduire le schéma à l’échelle de l’ État. Les milliardaires qui disent se lancer en politique pour « rendre à ce pays un peu de ce qu’il leur a donné » consacrent ensuite une partie de leur fortune aux « charities (associations caritatives américaines) » … Enfin ça, s’est relaté par des journalistes Français !
Interprétation libre d’articles de Diego Chauvet et C. Lerdellant, par MC