USA, le pays de la liberté… euh !!

Haro sur l’avortement au Mississippi

L’État du Sud profond comptait quatorze centres d’IVG au début des années 1980. Il n’en reste plus qu’un, et il pourrait bientôt fermer ses portes. Témoignages de militants pro- life et pro-choice.

La Women’s Health Organization de la ville de Jackson a la triste particularité d’être la dernière clinique du Mississippi à pratiquer des avortements. En 1981, cet État en comptait quatorze, mais les treize autres ont fermé en raison d’une législation de plus en plus restrictive.

USA IVG 001

En avril 2011, le gouverneur républicain, Phil Bryant, a ratifié une loi qui exige des médecins pratiquant l’avortement dans son État qu’ils soient autorisés à recevoir leurs patients dans un hôpital local. Pour la Women’s Health Organization, cela pose un problème, car ses deux médecins, qui viennent d’autres États, ne bénéficient pas de ce « privilège hospitalier ».

Le gouverneur a qualifié cette loi de « première étape d’un mouvement appelé à concrétiser ce pour quoi (j’ai) fait campagne : supprimer la pratique de l’avortement dans le Mississippi ».

Désormais, les avortements ne sont autorisées dans le Mississippi que jusqu’à seize semaines de grossesse, alors que, dans beaucoup d’autres États, la procédure reste légale jusqu’à vingt-quatre semaines. L’État requiert des cliniques spécialisées qu’elles se conforment aux mêmes règles de construction que les hôpitaux, même si d’autres établissements médicaux en sont dispensés.

Avant chaque intervention, les médecins sont tenus de faire une échographie, de la montrer à la patiente et de lui faire écouter les battements de cœur du fœtus. Les femmes doivent être reçues en entretien avec un médecin et attendre au moins vingt-quatre heures avant de se faire avorter.

Quant aux mineures, elles doivent avoir le consentement de leurs parents. Contrairement à d’autres États qui n’appliquent pas certaines de ces restrictions, le Mississippi les a toutes adoptées. Il a d’ores et déjà l’un des taux d’avortement les plus bas des États-Unis, avec seulement 5 % de femmes qui choisissent de mettre fin à leur grossesse, contre une moyenne nationale de 19 %.

C’est l’un des trois États du pays (avec le Dakota du Nord et le Dakota du Sud) à avoir un seul centre d’IVG et aucun médecin local pratiquant l’avortement. Le Center for Reproductive Rights (1) a dénoncé la nouvelle loi, et le ministère de la Santé du Mississippi a autorisé la clinique à rester ouverte à condition qu’elle se mette en conformité avec les nouvelles dispositions.

Dans le cas contraire, Michelle Movahed, une avocate du centre, craint que sa fermeture ne déclenche une réaction en chaîne et qu’un nombre croissant d’États ne se servent de formalités administratives pour fermer des cliniques, ce qui viderait de sa substance l’arrêt Roe v. Wade de la Cour suprême (2). « Le Mississippi est un endroit rêvé pour ce que cherchent à faire les militants anti-avortement« , souligne-t-elle.

Enquête et portraits réalisés par Kate Sheppard

Mother Jones (extraits) San Francisco

Notes

1)      Center for Reproductive Rights  – Centre pour les droits reproductifs, une ONG dont le siège est à New York

2)      Arrêt Roe v. Wade – En 1973, a légalisé l’avortement aux États-Unis

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Et en France, vous nous dites …

La stratégie insidieuse des anti-IVG sur le Net

Par Judith Duportail  – Le Figaro Permalien

Se présentant comme neutres et ressemblant à des sites officiels, des sites présentent l’IVG comme un acte douloureux et aux conséquences psychologiques irrévocables. Le gouvernement promet un site officiel.

Le ton est calme, enveloppant et rassurant. «Vous êtes perdue, et c’est normal.» «Merci pour votre confiance, bravo pour votre courage à exprimer vos émotions.» Au téléphone, la voix chuchote et apaise. « Je suis là pour vous écouter, expliquez-moi de quoi vous avez peur. » Ces paroles émanent des conseillers bénévoles qui œuvrent pour des sites comme écouteivg, ivg.net ou sos-bébé. Tous possèdent une ligne d’écoute et un service d’assistance par mail. Ils s’adressent aux femmes enceintes qui ne savent pas si elles veulent mener à terme leur grossesse. Ces sites apparaissent en haut de la liste quand la requête « IVG » est formulée sur Google. Un design neutre, des numéros verts, des descriptions comme « centre national d’écoute anonyme et gratuit » ou « centre de documentation national sur l’avortement » laissent penser qu’il s’agit de sites officiels.

Mais quand l’échange se prolonge, s’il n’est jamais déconseillé explicitement d’avorter, le message se fait de moins en moins neutre, a constaté Le Figaro en consultant des courriels échangés entre ces sites et des femmes à la recherche d’assistance. « Il faut neuf mois pour faire un enfant, mais aussi neuf mois pour faire une maman ». « Ce bébé peut vous apporter un élan de motivation profonde pour construire une belle vie. » « Peut-être vous ne devriez en parler à personne. Ce trésor n’appartient qu’à vous. » « Tant de femmes s’engagent dans une IVG sans bien avoir mesuré ce qui allait se passer et souvent le regrettent. »

«J’ai tué mon bébé»

À aucun endroit la légalité de l’avortement n’est remise en question ou la détresse que peuvent ressentir certaines femmes enceintes sous-estimée. Mais les témoignages d’IVG postés sur ces sites font tous le récit d’un traumatisme suivi de regrets. « J’ai arraché mon bébé, je l’ai fait disparaître, en gros j’ai tué mon bébé », écrit une certaine Élodie de 23 ans sur ivg.net. L’embryon ou le fœtus est systématiquement appelé « le bébé » et la femme enceinte la « future maman ». Pas d’opposition frontale donc, mais un message martelé l’air de rien. « Ce n’est plus la légalité de l’avortement qui pose problème aujourd’hui mais sa légitimité », a expliqué Nathalie Bajos, spécialiste de l’avortement à l’Inserm, à l’Agence France Presse dans une enquête consacrée au sujet.

Les membres des associations à l’origine des sites refusent d’être qualifiés «d’anti-avortement». «Nous publions des témoignages de femmes en souffrance car nous en recevons, il s’agit d’honnêteté», réagit un membre d’ecoute-ivg, qui a choisi de rester anonyme. Derrière ecoute-ivg, «une trentaine de personnes qui ont toutes été confrontées à l’avortement», poursuit notre interlocuteur. Ivg.net dit enregistrer environ 2.000 visites par jour. Pour sa responsable, la plate-forme délivre des informations «neutres».

Sos-bébé, (un site qui évoque aussi d’autres problématiques liées à la grossesse comme le handicap du fœtus ou les fausses couches) se défend aussi de tout biais. Mais nulle part le site ne précise que les bénévoles qui répondent aux mails et au téléphone font partie d’Alliance Vita, mouvement créé en 1993 par Christine Boutin dont les membres sont catholiques pour leur majorité.

Des sites « trompeurs » mais « pas hors la loi »

Ces sites sont « extrêmement trompeurs », a reconnu la ministre du Droit des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, en janvier dernier, mais « ils ne sont pas hors la loi ». En guise de réponse, la ministre a appelé « les associations à se développer sur Internet, à envahir les réseaux sociaux pour lancer une contre-offensive », comme l’avait relevé Le Lab. Najat Vallaud-Belkacem prévoit également de mettre en place un site gouvernemental d’informations sur l’IVG, sans indiquer de date précise de mise en ligne. En attendant, les femmes s’alertent entre elles et racontent sur des forums leur expérience désarmante face à ces conseillers qu’elles croyaient objectifs.

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Le pire de l’argumentaire anti-avortement

Les Inrockuptibles

Samedi 15 décembre, des membres de l’association catholique anti-avortement “SOS Tout-petits” ont manifesté aux abords du centre IVG de l’hôpital Tenon, avenue Gambetta (XXe). Les journalistes de Télé Bocal leur ont donné la parole. Il en résulte 12 minutes d’idées reçues, d’aberrations et de clichés d’un autre temps, proférés par des personnes apparemment terrifiées par la société moderne. Mais le plus effarant survient lorsque ces manifestants se mettent à prier dans la rue.

http://vimeo.com/55366866