François Hollande renoue avec une vieille tradition française
« Mon Afrique », titrait Il Manifesto le 14 janvier, quelques jours après l’offensive militaire française. François Hollande a eu beau répéter que l’époque de la Françafrique était définitivement révolue, il a voulu démontrer qu’il n’avait rien à envier à l’énergique Sarkozy et faire en tout cas « quelque chose de droite » (allusion à une phrase culte en Italie – « Dis quelque chose de gauche » adressée par Nanni Moretti à Massimo D’Alema dans son film Aprile). Il s’est déjà exposé sur le dossier syrien (et certainement pas pour des motifs humanitaires).
Pas de quoi crier à l’usurpation : le Mali est de fait un État en déliquescence. Mais le « beau geste* » de Paris se révèle d’autant plus insensé et hypocrite qu’il ne sera facile pour personne de rétablir la souveraineté dans ce qui reste du Mali. Le capitaine Sanogo, auteur du coup d’État de mars 2012 et d’un second coup d’État en décembre dernier pour se débarrasser d’un chef de gouvernement devenu gênant, ne s’est pas privé de son côté d’accuser de « néocolonialisme » les différentes forces qui s’empressent d’aider » le Mali, sans faire apparemment de distinction entre les pays voisins et les grandes puissances.
A l’heure des décisions, la France a réagi en usant de son « droit-devoir » d’ancienne puissance coloniale. Le Mali se rapprochait certes un peu trop des États-Unis, au point d’apparaître comme le siège officieux de l’Africom, le commandement militaire unifié pour l’Afrique, instauré en 2007 par George Bush et consolidé depuis par Barack Obama. On ne manquera pas, d’ailleurs, de s’interroger sur les errements d’une grande puissance comme les États-Unis, prise au dépourvu par le putsch d’une armée qu’elle équipe, forme et vraisemblablement contrôle.
Alors que l’Union africaine semblait résolue à faire respecter le principe de « solutions africaines pour les crises africaines », les crises comme celle du Mali (ou de la Somalie) sont promues d’office au rang de questions globales et traitées comme telles. Dans la logique de la guerre contre la terreur, tous les chats sont gris. Peu importe que le Mali, au même titre que les autres pays de la bande sahélo-soudanaise, passerelle entre l’Afrique arabe et l’Afrique noire, soit aux prises avec de délicats problèmes d’édification de l’État (state building).
L’obsession de la « sécurité » compromet irrémédiablement les processus internes dans un contexte vulnérable au regard des conditions climatiques et de l’exceptionnelle fragilité du système économique du Mali.
Il Manifesto (extraits) Rome – Gian Paolo Calchi Novati, spécialiste du colonialisme
* En français dans le texte.