Le rapport annuel sur l’état de la France 2011 rend compte de l’évolution de notre pays dans les champs économique, social et environnemental en s’appuyant notamment sur les indicateurs de développement durable. Il est chapeauté par un avis dont la partie générale analyse la convergence de plusieurs crises, qui se combinent et constituent au total une crise systémique. Dans sa focalisation sur l’état moral des Français, le CESE souligne que le monde traverse une crise profonde, les Français en perçoivent les menaces ; en saisir les opportunités exige des changements.
RAPPORT ANNUEL SUR L’ÉTAT DE LA FRANCE en 2011
La situation économique, sociale et environnementale
Le rapport sur l’état de la France du Conseil économique, social et environnemental prend, pour la première année, la suite du Rapport de conjoncture. Dans les travaux précédents, une place importante avait été donnée à la crise. Il nous faut dépasser l’utilisation, parfois incantatoire, de ce terme, expliciter les phénomènes et évolutions qui donnent un caractère singulier à la période actuelle.
La perte de valeur du marché de l’immobilier des particuliers aux États-Unis en 2007 conduit à un défaut de remboursement des prêts qui, en une année, avec la dérégulation des activités financières, s’est diffusé à l’ensemble du système financier international. Seule une intervention publique massive parvient à l’enrayer, mais elle transfère la crise de la dette vers les États.
L’érosion de 10 points en 25 ans de la part des salaires dans la valeur ajoutée des pays de l’OCDE, y compris la France, ne permet pas d’espérer retrouver une consommation importante dès lors que le substitut du crédit pour augmenter le pouvoir d’achat se retrouve épuisé. Enfin les limites de notre planète ajoutent une contrainte impérative aux activités humaines par une raréfaction et un renchérissement des ressources et par leurs conséquences (réchauffement climatique notamment).
Ces convergences donnent à la crise un caractère inédit. Elle est multifactorielle, globale et systémique. Elle impose une métamorphose, une transition, ce pour quoi Edgar Morin appelle à une « politique de civilisation ». « Pays intermédiaire » selon la formule de Jean-Hervé Lorenzi, la France a des atouts pour réussir sa mutation.
André-Jean GUÉRIN
LES PROPOSITION DU CESE
RASSEMBLER LES FRANÇAIS
- Poursuivre une politique familiale équilibrée qui ouvre l’accès à des services et des droits sur une base universelle, garantir aux jeunes de bonnes conditions d’éducation, de formation et d’emploi
- Réduire les inégalités par le haut et lutter contre la pauvreté, mesurer les difficultés concrètes des gens, déployer une palette diversifiée de politiques redistributives
- Réformer la fiscalité pour redonner l’assurance d’une contribution équitablement répartie
SE PROJETER DANS L’EUROPE
4. Renforcer la compétitivité de la France au sein de la zone euro notamment par la qualité, la R&D, l’innovation et la compétence des salariés
5. Impulser des changements profonds dans la construction européenne, ouvrir des débats publics sur les projets fédérateurs pour la zone Euro
CONTRIBUER À LA CONSTRUCTION DU MONDE
6. Affirmer la responsabilité de chaque politique face aux menaces d’une surexploitation du monde
7. Porter ce message dans les enceintes internationales en commençant par celle de l’UE
8. Étre exemplaire et adopter un mode de développement en accord avec nos préconisations
METTRE EN OEUVRE QUELQUES ORIENTATIONS PRIORITAIRES VISANT CHACUNE UNE AMÉLIORATION DE LA COMPÉTITIVITÉ, DE L’ÉQUITÉ ET DE LA SOUTENABILITÉ
9. Purger le passé, c’est à dire contenir et réduire notre dette publique tout en investissant dans la formation des jeunes générations, dans les infrastructures, dans les filières industrielles d’avenir
10. Utiliser davantage les signaux prix (y compris fiscaux) pour permettre la prise en compte des conséquences collectives des choix individuels
11. Réformer les prélèvements obligatoires dans un souci de simplification et de meilleure transparence, (saisine prochaine du cese)
12. Etablir un plan pour une consommation durable assorti d’un suivi annuel
13. Poursuivre avec le CESE la détermination d’indicateurs de bien-être et de soutenabilité, les populariser et les utiliser pour l’évaluation des politiques publiques
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Les français sont peu confiants dans l’avenir collectif alors que des évolutions majeures engagent une ère nouvelle. La crise a aggravé la situation de nombreux Français. Nier les difficultés serait absurde. Il faut s’efforcer de porter un diagnostic réaliste puis envisager l’avenir et le préparer. Le long terme, essentiel, est trop souvent négligé.
La société française est de plus en plus fragmentée… tant au regard des revenus et des patrimoines que de la culture.
Les Français sont plus inquiets que la moyenne des citoyens du monde sur l’avenir de leur pays. Ils vivent mal la mondialisation et sont inquiets des atteintes à l’environnement. La crise actuelle accentue les peurs. Face à ces défis, ils attendent des propositions d’actions, une plus grande lisibilité des politiques publiques, une capacité d’anticipation.
76 % des Français considèrent qu’il serait utile que notre société ait un but commun auquel cela vaudrait la peine de se consacrer
L’appartenance à l’Union européenne est diversement appréciée. La construction européenne actuelle ne répond qu’imparfaitement aux espoirs et ses bénéfices sont peu cités.
La méfiance des Français envers les institutions croit. Ils ont le sentiment d’être privés d’une vision à long terme et de choix réels. Les responsables politiques sont critiqués. Le rôle de l’Etat a changé. Les médias contribuent parfois par des analyses caricaturales à cette perte de confiance.
Focus sur L’ÉTAT MORAL DES FRANÇAIS
Les Français s’inquiètent pour l’avenir des systèmes de solidarité collective. La crise a accentué la méfiance à l’égard des institutions financières et des grandes entreprises. L’évolution des finances publiques suscite des craintes. Les systèmes fiscaux et sociaux sont opaques voire inégalitaires…mais le dynamisme des Français se déploie dans la sphère privée
Un puissant mouvement d’individualisation se profile mais beaucoup s’engagent aussi dans des actions collectives. Les liens de proximité sont appréciés. Ainsi, la société française semble en voie d’« archipellisation ».
Les jeunes expriment de réelles inquiétudes, en France plus qu’ailleurs, mais ils sont optimistes quant à leur vie personnelle. Les difficultés d’accès à l’emploi impactent leur moral. Le système scolaire exclut certains jeunes mais produit aussi des diplômés d’excellence. L’entrée des jeunes dans la vie active est de plus en plus laborieuse, en Outremer notamment. Leurs emplois, qui supportent l’essentiel de la flexibilité du travail, ne répondent pas toujours à leur attente. Le mal-logement est aussi le lot de la jeunesse.
REDONNER CONFIANCE EN NOS ATOUTS
La France a de nombreux atouts, insuffisamment mis en valeur. La France a une richesse culturelle, de créativité et d’Imagination, des capacités d’adaptation… L’enseignement des langues, les échanges avec l’étranger sont essentiels. Donnons à tous les jeunes leurs chances pour vivre dans un monde ouvert.
Il ne faut pas opposer performance économique, cohésion sociale et préservation d’un environnement de qualité : les trois sont liées. Il faut rééquilibrer les finances de l’Était sans sacrifier l’essentiel, miser sur l’avenir en favorisant la recherche, les pôles de compétitivité, l’économie verte, en améliorant l’éducation, en soutenant les entreprises (spécialement les PME-TPE).
REDONNER CONFIANCE EN L’ACTION PUBLIQUE
Il s’agit de permettre un large accès à la vie politique et de faciliter la mise en responsabilité des jeunes:
- en limitant les mandats dans le temps,
- en adoptant un véritable statut de l’élu,
- en synchronisant la tenue des diverses élections.
Il s’agit aussi de redonner confiance dans les fondamentaux du service public et de ne pas miner la confiance des Français dans leur système de protection sociale.
Le sentiment d’inefficacité concernant le système judiciaire est notamment lié à l’Insuffisance de moyens humains et matériels.
Il faut restaurer la confiance des jeunes dans leur avenir professionnel, renforcer l’accompagnement des jeunes vers l’emploi et mieux valoriser l’alternance. Les jeunes sans qualification doivent acquérir des connaissances de base. Les agents de Pôle emploi devraient être mieux formés pour répondre aux attentes des jeunes.
Enfin, il faut recréer du lien social dans une société fragmentée, sortir de l’immédiateté pour parvenir à un meilleur dialogue, en associant les citoyens aux défis de demain et moderniser le débat public pour construire des projets partagés.
REDONNER CONFIANCE EN L’ENTREPRISE
Le CESE préconise d’investir dans la jeunesse. En particulier, l’accès des crédits bancaires aux jeunes entrepreneurs doit être facilité.
La participation des salariés dans l’entreprise doit être redéfinie. Des évolutions législatives doivent favoriser les formes de participation des salariés sans affecter les salaires.
Le CESE suggère de chercher un meilleur équilibre entre d’une part les entreprises et leurs éventuels sous-traitants et d’autre part entre les différentes parties prenantes dans l’entreprise.
De façon générale, il faut avancer vers un dialogue social rénové.
REDONNER CONFIANCE EN L’EUROPE
La période de crise actuelle, malgré ses dangers, peut aussi être porteuse d’espoir et de progrès si des avancées significatives sont décidées, en particulier en matière d’harmonisation sociale et fiscale.
REDONNER CONFIANCE EN L’AUTRE
La France évolue vers une plus grande diversité. Le CESE insiste pour qu’un « pacte républicain »soit mis en œuvre pour encourager le vivre-ensemble.
Les Français sont en quête de sens collectif et d’une vision à long terme. Il faut donner toutes leurs chances aux jeunes. Il faut que les citoyens puissent juger de la pertinence des choix opérés sans éluder le diagnostic. La période actuelle de rupture impose de restaurer la confiance pour préparer l’avenir.
Osons définir une stratégie afin de tirer parti des nouvelles opportunités.
Retrouvez l’intégralité de l’avis et du rapport sur lecese.fr
Yves Zehr
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Source officielle – Permalien
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Notes : comme tous les rapports, celui-ci reste sujet à interprétation d’autant dépendante de la sensibilité de celui-celle-ceux qui le lira-liront mais aussi de par la façon dont il est construit et analysé. MC