« L’efficacité des traitements médicaux, les nouvelles techniques chirurgicales et percutanées, les mesures de prise en charge des facteurs de risque (hypertension, hypercholestérolémie, tabagisme, diabète) et de prévention des accidents cardiovasculaires ont fait reculer de manière très importante la mortalité par infarctus du myocarde et par insuffisance cardiaque, les deux pathologies cardiaques responsables du plus grand nombre de décès », se félicite Richard Dorent, cardiologue, membre de l’Agence de biomédecine (direction médicale et scientifique du Pôle stratégie greffe).
Traitements de choc contre troubles du rythme
En ce qui concerne l’infarctus, plusieurs méthodes thérapeutiques ont favorisé cette avancée : thrombolytiques pour dissoudre les caillots obstruant les artères, angiographie (aussi appelée coronarographie) avec désobstruction des coronaires et implantation de stems (angioplastie) pour maintenir ouverte une artère qui se bouche, nouveaux médicaments antiagrégants plaquettaires empêchant la formation de caillots et de thrombose dans les vaisseaux.
Du côté de l’insuffisance cardiaque, « le développement du traitement percutané des maladies valvulaires, une intervention de routine bien cadrée aujourd’hui, a changé favorablement la vie des patients », déclare Jean-Marc Davy, coordinateur du département de cardiologie et des maladies vasculaires au CHU de Montpellier.
« Les patients atteints de troubles de la conduction électrique peuvent bénéficier de la resynchronisation cardiaque qui améliore la fonction du cœur », poursuit Jean-Noël Trochu, chef de service de la clinique cardiologique et des maladies vasculaires à l’Institut du thorax du CHU de Nantes.
L’implantation d’un défibrillateur automatique, qui délivre un choc électrique en cas d’un trouble du rythme menaçant, aboutit en outre à une bien meilleure prévention de la mort subite. « Concernant les troubles du rythme comme la fibrillation auriculaire, leur traitement a progressé grâce à l’avènement de la technique de radiofréquence », ajoute Jean-Noël Trochu.
Tous ces progrès techniques et pharmacologiques ont permis non seulement de réduire la mortalité, mais aussi de diminuer les hospitalisations et d’améliorer la qualité de vie.
L’assistance circulatoire pour avancer
Le succès des traitements, associé l’amélioration de la prise en charge de l’hypertension artérielle et de ses complications, a cependant entraîné une modification du profil des patients. « L’augmentation de la longévité liée aux progress médicaux fait qu’ils sont de plus en plus nombreux à présenter une insuffisance cardiaque avancée », constate Jean-Noël Trochu.
Aujourd’hui, certains d’entre eux bénéficient d’une transplantation cardiaque ou d’assistances circulatoires (pompes implantables). « Le nombre limité de greffons a conduit les médecins à développer des traitements alternatifs. Les systèmes d’assistance circulatoire se miniaturisent, gagnent en autonomie et en fiabilité. Ils permettent d’améliorer la qualité de vie et la survie des patients. Leur limite reste la présence d’un câble traversant la peau nécessaire à l’alimentation électrique de la pompe et le faible recul par rapport à celui de la greffe », signale Richard Dorent.
D’autre part, ces systèmes ne concernent que les patients ayant une défaillance isolée du ventricule gauche. Quid des personnes dont les « Cœurs droit et gauche » ne fonctionnent plus? De nombreux travaux de recherche sur le cœur artificiel, la thérapie cellulaire et la thérapie génique tentent d’apporter une réponse. « Avec la thérapie cellulaire, il s’agit de favoriser la régénération du cœur par l’injection de cellules souches », explique Jean-Noël Trochu.
Quant à la thérapiegénique, elle a pour but d’améliorer la contraction des cellules restantes, après un infarctus notamment. « Ces solutions thérapeutiques suscitent beaucoup d’espoir, mais elles ne sont pas encore pour aujourd’hui », modère Richard Dorent.
Autre progrès : l’éducation du patient
Parallèlement aux traitements proprement dits, la stratégie de prise en charge des facteurs de risque cardio-vasculaire a beaucoup évolué. « La diffusion de médicaments, comme les statines dans le traitement de l’hyper-cholestérolémie notamment, participe largement à la réduction de la mortalité cardiovasculaire. Pour traiter le diabète et l’hypertension artérielle, les médecins disposent également d’un large arsenal thérapeutique », commente Richard Dorent.
L’éducation thérapeutique du patient (ETP) tient également une grande place au sein des avancées en cardiologie. Elle vise à « faire en sorte que le patient soit non seulement informé sur sa maladie mais participe aussi activement à la prise en charge de celle-ci », précise Richard Dorent.
Des programmes d’ETP ont ainsi été développés, les centres hospitaliers entreprennent des initiatives dans ce domaine, et des réseaux de cardiologues, généralistes et paramédicaux les valorisent. « La part d’éducation dans l’insuffisance cardiaque est très importante, que ce soit pour le dépistage précoce des signes de la maladie par les patients eux-mêmes ou pour la bonne observance des traitements », souligne Jean-Noël Trochu. « L’ETP est également d’un grand intérêt chez les patients sous antithrombotiques et chez ceux à haut risque cardiovasculaire après infarctus du myocarde.»
Plus globalement, les apports de l’éducation des patients se font ressentir au niveau de la prévention des récidives, de la diminution des hospitalisations, de l’augmentation de la qualité de vie, voire de la réduction de la mortalité. « Pour l’instant, 5 à 10% seulement des personnes bénéficient de l’ ETP. Pour que cette pratique puisse s’étendre, une sensibilisation de de tous les acteurs, professionnel et patient, est nécessaire », insiste Jean-Marc Davy.
Prévenir les maladies cardio-vasculaires en agissant sur la qualité de nos modes de vie demeure en effet l’un des meilleurs moyens de les combattre.
Claire Reuillon – Revue Valeurs Mutualistes N°280