Médicaments :

Génériques ou non remboursement !

L’Assurance maladie, qui vient de sanctionner une pharmacienne parce qu’elle ne vendait pas assez de génériques, semble franchir un cap supplémentaire dans sa stratégie du « tout générique ». Les pharmaciens se sont engagés à ne plus faire bénéficier du tiers payant aux patients qui refusent un générique. Et ne doivent plus tenir compte de la mention NS si celle-ci n’est pas correctement écrite.

La Sécu est bel et bien partie « en guerre » contre les professionnels de santé qui ne joueraient pas le jeu des génériques. Si elle ne prévoit pas pour l’heure des sanctions du côté des prescripteurs, elle n’hésite plus à hausser le ton du côté des pharmaciens.

Comme en témoigne Jacqueline Girardaux, pharmacienne installée dans le centre d’Airvault dans les Deux-Sèvres et sanctionnée pour ne pas avoir vendu assez de médicaments génériques.

« Début 2011, la Caisse d’assurance maladie de Niort nous a intimé l’ordre de vendre 60% de génériques. Nous étions alors à 30% et en l’espace de quelques mois nous n’avons atteint que 50% », raconte la co-gérante de la pharmacie. Depuis, l’officine s’est vue notifier fin juillet qu’elle serait déconventionnée et ne pourrait appliquer aux clients le tiers payant pendant un mois. La seule façon de minimiser sa sanction serait pour elle d’embaucher un pharmacien remplaçant qui serait conventionné. « D’après ce que je sais de source syndicale, nous sommes les premiers. Ils ont voulu faire un exemple », a indiqué la pharmacienne qui entend faire appel auprès du Tribunal des affaires sanitaires et sociales.

Une sanction «exceptionnelle»

La CPAM des Deux-Sèvres a confirmé la sanction expliquant que les pharmaciens mis en cause « n’ont pas appliqué l’accord conventionnel du tiers-payant générique ». « Le taux de distribution de médicaments génériques dans l’officine incriminée se situe de 30 à 50% alors que la majorité de la profession dans le département affiche des taux compris entre 75 et 80 % », a déclaré au Courrier de l’Ouest Julien Bouchereau, responsable régulation-juridique de la CPAM locale.

Interrogé sur France info vendredi matin, Frédéric Van Roekeghem, le directeur général de la CNAM, a déclaré que « cette sanction est exceptionnelle, cette pharmacie est celle qui a les plus mauvais résultats en terme de génériques ». « C’est injuste et de mauvaise foi », a réagi de son côté la pharmacienne, qui dit avoir fait son possible mais assure que de nombreux médecins prescrivent des médicaments « non substituables ».

L’incident est la première application de l’accord sur les génériques passé avant l’été avec les pharmaciens en marge de la nouvelle convention qu’ils ont signé avec les caisses.

Bisbilles autour de la mention NS

L’affaire montre également que l’Assurance maladie est bien décidée à ne rien lâcher sur les génériques. La Cnamts espère ainsi continuer à voir le taux de substitution progresser. Elle souhaiterait en effet atteindre 85% de délivrance génériques dans le répertoire d’ici à la fin de l’année contre 72% seulement en avril dernier, près de 78% à fin août.

Pour y arriver, les officinaux se sont donc engagés à ne pas appliquer le tiers payant aux patients qui refuseraient les génériques proposés en pharmacie. Et, sur le front du « NS« , elle a aussi renforcé la réglementation. Certes, le médecin prescripteur peut toujours s’opposer à la délivrance d’un générique, dès lors qu’il indique « non substituable » sur l’ordonnance. Mais cette mention doit être manuscrite, écrite en toutes lettres et placée en face de chacune des lignes de prescription auxquelles elle s’applique. L’abréviation « NS » n’étant pas suffisante.

Cette disposition, qui n’est en soi pas nouvelle – elle date de 2004 – s’impose aux pharmaciens depuis cet été dans le cadre du dispositif « tiers payant contre générique ». Signé entre les syndicats d’officines et l’Assurance maladie, le texte prévoit que les pharmaciens ne sont pas tenus de respecter cette mention si celle-ci n’est pas inscrite comme indiqué dans les textes.

Le thème des génériques fait grincer dans les syndicats médicaux. Dans un communiqué commun avec le syndicat de pharmaciens USPO, MG France souligne que « les généralistes ne veulent pas que leurs patients reviennent leur demander de modifier leur prescription sur proposition de leur pharmacien. » Et le communiqué ajoute que « en aucun cas le pharmacien ne doit renvoyer des patients vers le médecin pour une demande de mention non substituable, celle-ci étant strictement encadrée par la réglementation, de la seule initiative du prescripteur, et doit rester l’exception. » Entre médecins, pharmaciens et Sécu, il y a visiblement un besoin de clarification. Et d’ailleurs, selon MG France un accord conventionnel tripartite doit intervenir bientôt sur la question des génériques.

ou retrouver l’article original : Caroline Laires-Tavares – Le généraliste